LE BRESIL ET LE MONDE

n° 131 - Printemps 2011

Stéphane Monclaire - Au cours des dernières années de la présidence Lula, la politique étrangère du Brésil a souvent été qualifiée par la presse internationale d'« offensive diplomatique tous azimuts ». Cette expression vous semble-t-elle justifiée ?
Marco Aurélio Garcia - Il ne faut pas s'illusionner sur la nature de notre action. Nous ne menons pas une diplomatie globale qui serait comparable à celle des États-Unis. Nous avons simplement essayé, à certains moments, de prendre des initiatives sur des questions qui n'avaient jamais été au coeur de la politique étrangère brésilienne : le Moyen-Orient et, plus particulièrement, le dossier nucléaire iranien. Nous avons aussi recommencé à agir sur certains fronts qui avaient été délaissés : la politique à l'égard de l'Afrique, par exemple. Tout cela est vrai. Mais il est arrivé que l'agenda international nous soit imposé. Prenez le cas du BRIC. Comme chacun le sait, l'acronyme BRIC n'a pas été inventé par nous ; ni par la Russie, l'Inde ou la Chine. Toutefois son usage, en se généralisant, a fini par inciter les gouvernants de ces quatre pays à envisager de doter cette abstraction de véritables institutions. Notre première réunion n'a duré que deux minutes, le temps d'une photo lors d'un sommet du G8 au Japon. Après, la chose a gagné en authenticité. C'est pourquoi l'expression « offensive tous azimuts » me paraît inadéquate.
S. M. - Pourtant, si l'on s'en tient au nombre d'ambassades ou de missions diplomatiques ouvertes sous la présidence Lula (pas moins de soixante-huit), on a bien le sentiment d'une accélération...
M. A. G. - Il est exact qu'il n'y a plus guère de pays où nous soyons absents. Mais plusieurs de ces ambassades ou missions ne sont pas vraiment nouvelles, dans la mesure où elles n'ont pas été créées sous Lula. Elles ont juste été rouvertes à l'occasion des visites à l'étranger effectuées par le président ou par ses ministres. J'ajoute que ce mouvement d'ensemble ne répond pas qu'à des préoccupations commerciales, comme le démontrent nos nouvelles ambassades en Afrique ou au Moyen-Orient. Nous nous préoccupons aussi de coopération.
S. M. - Lula jouissait à l'étranger d'un très fort capital de sympathie. La présidente Dilma Rousseff doit encore se faire un nom sur la scène internationale. Cette différence de notoriété ne risque-t-elle pas de compliquer le jeu de la diplomatie brésilienne, voire de compromettre ses chances de succès ?
M. A. G. - Ce décalage était inévitable, mais ne constitue pas un obstacle. Le grand mérite de Lula a été, à travers son investissement personnel, de contribuer à faire connaître le Brésil auprès de gens pour lesquels notre pays se résumait à Pelé, à Ronaldo, aux plages et au carnaval. Il avait l'art de présenter sous son meilleur jour ce pays différent qu'est devenu le Brésil. Mais dans les négociations au plus haut niveau, il savait aussi se montrer extrêmement agréable, ce qui en a surpris plus d'un et s'est révélé très profitable. Il avait bien compris que le Brésil ne pourrait pas se …

Sommaire

DIPLOMATIE FRANCAISE : LA CONFIANCE RETROUVEE

Entretien avec Alain Juppé par Baudouin Bollaert

« PRINTEMPS ARABE » : L'HISTOIRE N'A PAS DIT SON DERNIER MOT...

Entretien avec Jacques Julliard par la Rédaction de Politique Internationale

LA FOLLE HISTOIRE DE MOUAMMAR KADHAFI

Entretien avec François Heisbourg par Thomas Hofnung

SYRIE : LE DEBUT DU CREPUSCULE

Entretien avec Burhan Ghalioun par Loulouwa Al Rachid et Mohammad ali Atassi

L'EGYPTE ENTRE COUP D'ETAT ET REVOLUTION

par Sophie Pommier

TUNISIE : UNE TRANSITION TUMULTUEUSE

par Sophie Bessis

UN « MODELE TURC » POUR LES REVOLTES ARABES ?

par Dorothée Schmid

LA CAMPAGNE ANTI-FRANCAISE D'AL-QAIDA AU SAHARA

par Jean-Pierre Filiu

LE REFERENDUM SUD-SOUDANAIS ET SON IMPACT REGIONAL

par Gérard Prunier

JAPON : L'APRES-TSUNAMI

Entretien avec Claude Meyer par Grégory Rayko et Mathieu Bouquet

LE BRESIL ET LE MONDE

Entretien avec Marco Aurélio Garcia par Stéphane Monclaire

CHINE : LA SUCCESSION ET LE SUCCESSEUR

par Jean-Luc Domenach

DE LULA A DILMA...

par Stéphane Monclaire

RUSSIE : L'HEURE DE GLOIRE DU FSB

Entretien avec Andreï Soldatov par Galia Ackerman

LONDRES-PARIS : LA NOUVELLE ENTENTE CORDIALE

Entretien avec Liam Fox par Isabelle Lasserre

HONGRIE : UN PASSE QUI NE PASSE PAS...

Entretien avec Marton Gyongyosi par Luc Rosenzweig

BUDAPEST-UNION EUROPEENNE : LE TEMPS DES MALENTENDUS

Entretien avec Janos Martonyi par Luc Rosenzweig

« SECURITY BUSINESS » : LES NOUVEAUX MERCENAIRES

par Laurent Joachim