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LE REFERENDUM SUD-SOUDANAIS ET SON IMPACT REGIONAL

Le référendum organisé entre le 9 et le 16 janvier dernier a permis à la population du Sud-Soudan de se prononcer sur son avenir : soit la région restait au sein du Soudan uni tel qu'il existait depuis l'indépendance (1er janvier 1956) ; soit elle se séparait et devenait le 194e État membre des Nations unies. Le verdict des urnes est sans appel : 98,7 % des votants ont choisi la seconde option. La proclamation formelle de l'indépendance est désormais prévue pour le 9 juillet 2011, à l'expiration de la période intérimaire de six ans et demi prévue par l'accord de paix signé le 9 janvier 2005 à Nairobi. Cet accord avait mis fin à un immense conflit qui avait éclaté en mai 1983, lorsque le Sudan People's Liberation Movement (SPLM) du colonel John Garang s'était rebellé contre le gouvernement de Khartoum. Cette guerre est peu connue (1) et ses conséquences régionales le sont encore moins. Il est vrai qu'elles plongent leurs racines au plus profond des méandres géopolitiques de la Corne de l'Afrique - une région complexe, souvent indéchiffrable, située au confluent de l'Afrique et du Moyen-Orient. Le poids des années de guerre L'interminable conflit soudanais (1983-2002) et les longues négociations qui ont fini par y mettre un terme (2002-2005) s'étirent sur plusieurs périodes distinctes. En 1983, au moment où le colonel Garang prend les armes, la guerre froide bat son plein. À Khartoum, le maréchal Nimeiry, ancien nassérien reconverti dans l'alliance avec Washington depuis que les communistes ont tenté de le renverser en 1971, vient d'attribuer d'importantes concessions pétrolières à la société américaine Chevron. Son armée est équipée par les États-Unis et il représente la couverture sud de l'Égypte, seul pays arabe à avoir reconnu l'existence de l'État d'Israël. Pour l'Amérique, ce soulèvement des Noirs chrétiens du Sud a tout du « complot communiste ». En réalité, son chef, le colonel John Garang, était un soldat pragmatique, éduqué à l'école militaire de Fort Benning et à l'Université d'Iowa et secondé par des officiers qui n'avaient certainement pas lu Karl Marx. Mais, guerre froide oblige, les rebelles rejoignent immédiatement le territoire éthiopien où le régime militaro-communiste du colonel Menguistu Haile Mariam les accueille à bras ouverts. Dès les premiers mois du conflit, les rôles sont solidement distribués : Khartoum est appuyé par les Américains tandis que la guérilla du SPLM reçoit l'aide de l'Éthiopie communiste, de l'URSS et de la Libye du colonel Kadhafi (2). Autre conséquence de la géopolitique, locale cette fois-ci : Garang et ses hommes s'engagent sur un programme révolutionnaire vis-à-vis de Khartoum et ne font aucune allusion à une éventuelle sécession du Sud. Pourquoi ? Parce que leur mentor et protecteur Mengistu lutte à l'époque contre les rebelles érythréens qui ne font pas mystère de leurs visées sécessionnistes. Bien que ces rebelles se déclarent ouvertement communistes, ils sont rejetés par les Soviétiques qui préfèrent s'allier à Addis-Abeba plutôt que d'appuyer une guérilla marginale. Pour Garang, le choix est clair : il se présente comme le …