Nommé président de la Banque européenne d'investissement (BEI) (1) le 1er janvier 2012 par le Conseil européen et par les ministres des Finances de l'Union européenne, l'Allemand Werner Hoyer, né en 1951 à Wuppertal (dans la Ruhr), a succédé au Belge Philippe Maystadt qui avait exercé ces fonctions pendant douze ans. Membre du Parti libéral allemand (FDP) qui forme depuis 2009, avec la CDU chrétienne-démocrate, le gouvernement d'Angela Merkel, député au Bundestag sans interruption depuis 1987, M. Hoyer a été secrétaire d'État chargé des Affaires européennes au ministère des Affaires étrangères de 1994 à 1998 - poste qu'il a occupé à nouveau à partir de 2009 en tant que ministre. Docteur en économie et finances, il a participé activement à la préparation du traité de Maastricht. Il a assuré ces dernières années la coordination de la politique européenne du gouvernement allemand. Vice-président puis président du Parti européen des libéraux démocrates et réformateurs (ELDR), Werner Hoyer est, on l'aura compris, un libéral et un Européen convaincu. La Banque européenne d'investissement est sans doute la plus méconnue des institutions financières européennes. Aux côtés de la BERD et de la BCE (2), elle joue pourtant un rôle fondamental. Créée en 1958 en vertu du traité de Rome, cette banque, dont le capital est détenu par les 27 États membres, a pour vocation de financer des projets dans les secteurs de l'énergie, de la recherche-développement, de l'innovation et des grands réseaux, notamment ferroviaires et routiers. Elle intervient, en particulier, auprès des PME. L'un de ses derniers investissements en France concerne la ligne de TGV Bordeaux-Paris (1,2 milliard d'euros). Suite au lancement par la nouvelle majorité en France d'un débat opposant austérité et croissance, des économistes et des politiciens semblent estimer, en Allemagne notamment, que la solution la plus saine et la plus efficace pour financer la croissance en Europe serait de recourir davantage à des prêts de la BEI (3). J.-P. P.
Jean-Paul Picaper - Bonjour, Monsieur Hoyer. Comment doit-on vous appeler ? Monsieur le Ministre ou Monsieur le Président ? Werner Hoyer - Les titres, vous le savez, désignent surtout des fonctions. Comme j'ai eu la chance, dans mon activité professionnelle, d'exercer de telles fonctions dans des domaines très variés, ne choisissons pas ! Appelez-moi simplement « Monsieur Hoyer ». J'en serais très heureux. J.-P. P. - Depuis que François Hollande - avec quelques autres - a fait de la croissance européenne son cheval de bataille, la BEI se trouve placée sous le feu des projecteurs. Lors du dernier sommet européen du 23 mai 2012, il a été décidé d'augmenter son capital de 10 milliards d'euros, portant ainsi sa capacité de prêt à 60 milliards d'euros. Quelles sont les répercussions de cette soudaine notoriété sur votre travail ? W. H. - Eh bien, tout d'abord, notre visibilité s'en trouve renforcée. Le siège de la Banque étant situé à Luxembourg, il n'est guère étonnant que nous soyons passés jusqu'ici un peu inaperçus à Bruxelles et dans les capitales des États membres de l'UE. Mais, vous le rappeliez, les choses ont radicalement changé en quelques semaines seulement. Brusquement, tout le monde parle de nous. J.-P. P. - Oui, plus que de la BERD et même que de la BCE. Avez-vous été invité à participer à l'élaboration d'un pacte de croissance en complément du pacte budgétaire européen ? W. H. - Oui, nous y avons effectivement participé. Des discussions communes ont été menées à plusieurs niveaux à Bruxelles, à Luxembourg et dans les capitales des États membres. On doit définir le champ des possibilités, les actions qui peuvent être entreprises et les conditions dans lesquelles elles peuvent être mises en oeuvre - ce qui n'est possible que sur la base d'une très étroite concertation. Le pacte budgétaire n'est pas fondamentalement nouveau, mais le degré d'engagement financier qui pourra être appliqué au titre de ce pacte est en nette augmentation. J.-P. P. - Faut-il poursuivre la politique d'austérité pour assainir les comptes ? W. H. - À mes yeux, l'assainissement des finances publiques et la croissance sont les deux faces d'une même médaille. Les divergences portent plutôt sur les moyens à mettre en oeuvre et sur le type de croissance qu'il faut générer. Les économistes se querellent sur cette question depuis près de 150 ans. Il n'est donc pas anormal que ces lignes de clivage se retrouvent sur le terrain politique. J.-P. P. - On dit que les États d'Europe n'utilisent pas intégralement les fonds qui sont mis à leur disposition par l'UE. Est-ce vrai ? W. H. - Il faut distinguer deux choses : les fonds structurels (4), qui sont des ressources budgétaires, et qui viennent en complément de financements nationaux ; et les prêts de la BEI, qui sont du seul ressort de notre banque. Le grand intérêt d'un prêt de la BEI réside dans les conditions dont il est assorti. Ces conditions sont, en règle générale, plus avantageuses que celles proposées par …
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