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Hassan Rohani, un Gorbatchev iranien ?

L'Iran est décidément un pays surprenant et son régime politique, la République islamique, une dictature plus pragmatique que l'on croit. Alors que tous les « iranologues » prédisaient une élection présidentielle sans enjeu, quatre ans après la secousse de 2009, qui avait ébranlé le régime sur ses bases (1), le scrutin de juin 2013 a débouché sur une énorme surprise : l'élection, dès le premier tour, de Hassan Rohani, un religieux sans grand relief, un apparatchik ayant exercé diverses fonctions importantes mais n'ayant jamais joué de rôle déterminant. Soutenu par les réformateurs, que l'on croyait définitivement enterrés après huit années de répression sous Mahmoud Ahmadinejad, M. Rohani s'est imposé face à plusieurs favoris soutenus par le Guide suprême Ali Khamenei ou par les pasdarans (Gardiens de la révolution), qui forment désormais un État dans l'État. Mais sa victoire n'est que le début du chemin. Hassan Rohani, qui a lancé une vaste opération de charme diplomatique lors de sa première venue à l'Assemblée générale des Nations unies en septembre 2013 à New York, va devoir composer avec ces deux puissantes institutions pour mettre en oeuvre son programme de réconciliation intérieure et d'apaisement extérieur.


La divine surprise


Un contexte difficile
L'élection présidentielle iranienne du 14 juin se présente dans un contexte tellement difficile que la plupart des observateurs en attendent peu de choses. De quelque côté que l'on se tourne, la situation est marquée par les tensions. Politique intérieure, contexte diplomatique, situation économique et sociale : tout est matière à inquiétude et donc à raidissement de la part du régime.
Sur le plan intérieur, la fracture ouverte par les manifestations de juin 2009, qui ont suivi la réélection contestée du président Mahmoud Ahmadinejad, n'est pas refermée. Malgré l'écrasement du Mouvement vert - nom donné au courant formé autour de MM. Moussavi et Karoubi, les deux candidats réformateurs écartés du scrutin -, le régime n'a jamais retrouvé la confiance en soi et la stabilité à laquelle il pouvait prétendre après trois décennies de République islamique. Au contraire, les différents courants conservateurs se sont rejeté la responsabilité d'une répression qui a choqué une partie importante de la société. Le Guide suprême, Ali Khamenei, a eu à subir la contestation inattendue et virulente du clan regroupé autour du président Ahmadinejad : ce dernier a même tenté, au printemps 2011, de mettre la main sur les ministères stratégiques du Pétrole et des Renseignements avant de devoir battre en retraite. À partir de ce moment-là, l'entourage de M. Ahmadinejad a fait l'objet de violentes attaques au Parlement - où il a perdu les élections du printemps 2012 - et dans la presse conservatrice. Ces tensions ont culminé avec l'emprisonnement, à l'automne 2012, d'Ali-Akbar Javanfekr, le conseiller de presse présidentiel, puis avec les accusations lancées au printemps 2013 contre le président du Parlement, M. Larijani, considéré comme un proche du Guide.
Sur le plan diplomatique, non plus, la situation n'est guère brillante. Le contentieux nucléaire avec l'Occident reste entier. Les négociations, menées par un « dur », Saïd …