À l'été 2012, la fin du régime de Bachar al-Assad n'avait jamais semblé aussi proche. La rébellion avançait dans les faubourgs de Damas, progressait à Alep (la grande ville du Nord), contrôlait la longue frontière turque, s'imposait dans l'est du pays, parvenait à tenir certains quartiers de Homs, cette cité industrielle de l'Ouest qui avait été pendant de longs mois le coeur battant de la révolution. À l'exception d'un seul, tous les postes-frontières avec la Turquie, la Jordanie et l'Irak étaient tombés entre les mains des insurgés. En Israël, où l'on suit attentivement les événements syriens, l'armée et les services secrets étaient persuadés de l'imminence de la chute du pouvoir baasiste. Entendu par la commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset (le Parlement israélien), le chef d'état-major des forces armées, Benny Gantz, déclarait déjà en juin 2011, soit trois mois seulement après le début de la révolte : « Assad lui-même ne sait pas à quoi ressemblera la Syrie à la fin de cette semaine ou de la prochaine. L'incertitude le perturbe comme elle nous perturbe » (1). L'année suivante, Lakhdar Brahimi, l'émissaire spécial de l'ONU en Syrie, adressait oralement cette supplique au dictateur syrien afin de le pousser à chercher une solution politique à la crise : « Vous allez perdre ! L'opposition va gagner mais ce sera au prix de la destruction de Damas. » Ce à quoi son interlocuteur lui répondit : « Non, c'est exactement l'inverse qui va se produire. Je vais l'emporter et c'est l'opposition qui va perdre. Oui, le prix sera la destruction de Damas » (2).
L'avenir a donné en partie raison à Bachar al-Assad. La rébellion a échoué à avancer en direction du centre de Damas et se trouve totalement encerclée dans la plaine de la Ghouta orientale. Elle est aussi en recul à Alep ; et elle a finalement perdu Homs. La prise de cette dernière ville a permis aux forces loyalistes de progresser le long du corridor stratégique qui, via Homs et Hama, relie la capitale syrienne à la bande côtière méditerranéenne - où la communauté alaouite, entièrement acquise au clan au pouvoir, est majoritaire (3). Le régime a également marqué des points en consolidant son emprise sur les régions qu'il contrôle et en reprenant, en mai - grâce aux combattants du Hezbollah libanais et au prix de terribles combats -, la localité stratégique de Koussayr, près de la frontière syro-libanaise, puis en novembre celle de Qara, dans le massif du Qalamoun, au nord de Damas, une région également stratégique puisqu'elle commande l'accès au gouvernorat de Homs. Même s'il l'on ne peut guère parier sur sa survie à long terme, force est de constater que le président syrien s'est ressaisi, y compris sur le front diplomatique où il est redevenu un interlocuteur acceptable à la faveur de l'accord russo-américain sur le démantèlement des armes chimiques (4).
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