Depuis plusieurs années, on observe un retour en force de l'extrême droite en Europe et, plus particulièrement, en Europe du Nord (Belgique, Pays-Bas, Danemark, Norvège, Suède, Finlande). Ces mouvements surfent sur la peur de l'immigration, la crise économique et la paupérisation de la classe ouvrière, avec une dimension séparatiste en Belgique et en Italie. En Europe centrale et orientale, c'est le rejet total de toute forme de communisme et de socialisme qui, après 1989, conduit une partie de la jeunesse vers les groupes néonazis. À noter que les pays les plus touchés sont ceux qui s'étaient rangés derrière l'Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale (Roumanie, Bulgarie, Hongrie, Slovaquie, Croatie). Ces formations font toutes référence aux régimes totalitaires au pouvoir dans les années 1930 et 1940 (oustachis, Croix-Fléchées, Garde de fer...). Toutes développent un discours de haine envers les Juifs, les Rroms et les autres minorités vivant dans leur pays.
Mais c'est sans doute en Grèce que la percée d'un mouvement ouvertement néonazi est le plus spectaculaire. On pensait pourtant le pays vacciné contre cette résurgence : la terrible guerre civile des années 1946-1949 et, surtout, la chute de la junte des Colonels au lendemain de sa pitoyable aventure chypriote semblaient avoir mis un terme définitif à ce genre de dérive. C'était oublier l'existence d'un terreau réactionnaire, monarchiste et collaborationniste qui, depuis la libération du joug ottoman jusqu'à aujourd'hui, n'a jamais cessé de prospérer.
Le spectre de la guerre civile
Le 1er novembre 2013, deux militants du parti néonazi Aube dorée (Chryssi Avghi) (1) sont abattus par deux motards membres d'une organisation armée d'extrême gauche, les Groupes révolutionnaires populaires combattants. Face à cet assassinat particulièrement violent, les autorités et la presse crient au loup, craignant un risque de guerre civile.
Le 10 novembre 2013, Nikos Dendias, ministre conservateur de l'Ordre public, déclarait dans le journal Vima : « Ceux qui sont indifférents à la vie humaine et tentent de déstabiliser et de diviser la société rendront des comptes et seront punis. Nous ne permettrons pas aux extrêmes de nous entraîner vers une guerre civile. Le commencement d'une spirale d'attaques terroristes et d'une vendetta de sang sèmera à nouveau l'insécurité dans la société. » Une analyse partagée par le grand quotidien du centre gauche, Ta Néa, qui le même jour écrivait : « Ce crime n'est rien de moins qu'une attaque contre la démocratie elle-même. » Dans la même veine, son alter ego de droite, Eleftheros Typos, titrait : « Il est certain que les auteurs des faits ne cherchaient pas simplement à exercer des représailles politiques contre l'Aube dorée, mais visaient la stabilité du pays. » Seul le quotidien Avghi, proche du parti Syriza (Coalition de la gauche radicale, devenue la deuxième force politique de Grèce lors des élections du printemps 2012) dénonçait la « victimisation des néonazis ».
Pour la population grecque, le terme de guerre civile a un sens bien précis et ne saurait être galvaudé. Le pays a, en effet, vécu quatre expériences traumatisantes de ce type : …
Ce site est en accès libre. Pour lire la suite, il vous suffit de vous inscrire.
J'ai déjà un compte
M'inscrire
Celui-ci sera votre espace privilégié où vous pourrez consulter à tout moment :
- Historiques de commandes
- Liens vers les revues, articles ou entretiens achetés
- Informations personnelles