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Les cent jours qui ont changé l'Ukraine

En trois mois, les Ukrainiens ont fait prendre un virage majeur à leur pays. À l'issue de manifestations qui se sont terminées par de violents affrontements, ils ont chassé l'ex-président Viktor Ianoukovitch du pouvoir. Ils ont ainsi affirmé leur désir de se rapprocher de l'Union européenne plutôt que de la Russie, consolidé leur indépendance et affirmé leur volonté de rompre avec la corruption et les restes du passé soviétique.
Mais ils se sont aussitôt heurtés à une réaction hostile de la Russie qui a envahi militairement la Crimée et l'a immédiatement annexée. Il est difficile de dire jusqu'où ira cette confrontation. Ce qui est sûr, en revanche, c'est que l'insurrection de la place de l'Indépendance, à Kiev, a creusé un fossé entre une Ukraine déterminée à s'émanciper et une Russie décidée à la maintenir dans sa sphère d'influence.
La nouvelle Ukraine qui tente d'émerger apparaît encore très fragile. Elle a, certes, reçu le soutien économique et politique des Européens et des Américains. Mais il appartient désormais aux nouvelles autorités ukrainiennes de stabiliser le pays en démontrant leur capacité à accomplir des réformes et à créer les conditions de la croissance économique. Les défis sont immenses. Et les premiers mois du nouveau pouvoir montrent à quel point le chemin est étroit...


Le choix de l'Europe


La crise politique ukrainienne a éclaté en novembre dernier, lorsque le président Viktor Ianoukovitch a brusquement annoncé qu'il renonçait à signer l'accord d'association prévu avec l'Union européenne, préférant rechercher une alliance avec la Russie. Cet accord d'association était en négociation depuis 2008. Il avait été proposé à Kiev dans la foulée de la « révolution orange » de 2004, quand l'Ukraine a pour la première fois manifesté une volonté claire de s'intégrer à la famille occidentale.
L'impossible équilibre entre Russie et UE
L'accord d'association est un ensemble de textes destinés à rapprocher l'Ukraine du modèle européen, sans lui ouvrir pour autant de perspective d'adhésion. La partie la plus volumineuse du document est un traité de libre-échange. Il doit permettre à Kiev d'économiser 500 millions d'euros de droits de douane sur ses exportations vers le grand marché unique européen. Il l'oblige, en contrepartie, à se mettre au niveau des normes en vigueur dans l'UE. Le traité prévoit également l'instauration progressive d'un régime sans visas, ainsi qu'une série de programmes d'aide, notamment dans le domaine de l'énergie.
Profondément affectée par la crise de 2008, l'Ukraine se trouve à la fin 2013 dans une situation économique difficile, avec une croissance limitée à 0,4 % et un déficit budgétaire chronique. Conséquence : le pays a impérativement besoin d'un soutien extérieur.
La Russie, de son côté, a formulé un projet directement concurrent : une « Union douanière » dans laquelle elle souhaiterait inclure l'Ukraine. Vladimir Poutine travaille depuis plusieurs années à cette organisation. L'Union douanière doit rassembler, autour de la Russie, les pays que Moscou considère comme faisant partie de sa zone d'influence. Le Bélarus et le Kazakhstan ont été les premiers à y adhérer. Puis sont venues les promesses du …