Les Grands de ce monde s'expriment dans

La désillusion Obama


Il allait changer l'Amérique, lui faire oublier ses vieux démons, pacifier la société, rafraîchir la vie publique... « Yes, we can ! »... C'était en novembre 2008. Barack Obama était ce jeune « président-élu » au sourire incandescent, l'incarnation même du rêve américain et de l'espoir d'une nation. Six ans plus tard, en novembre 2014, lors des élections législatives organisées à la moitié de son second mandat, il est apparu las, les traits creusés, usé par l'exercice du pouvoir et l'incessant combat politique. Les électeurs, déçus, ont redonné la majorité à ses adversaires républicains dans les deux chambres, dénonçant pêle-mêle trop d'engagements grandioses mais vagues, trop de promesses impossibles à tenir. Ses détracteurs ont pointé du doigt l'inexpérience d'un homme à l'intelligence certes brillante, mais qui n'était pas rompu à l'exercice du pouvoir dans cette maison des Atrides nommée Washington. Alors, Obama a-t-il échoué ? A-t-il rendu les armes ? Ce désamour est-il la sanction, sévère mais méritée, de ses erreurs et de ses échecs ? Ou, au contraire, le fruit de l'inconséquence d'une opinion publique capable de brûler aujourd'hui ce qu'elle a adoré hier ? Est-il un mauvais président ? Ou fait-il injustement les frais de l'angoisse, de l'incompréhension, parfois de la sidération que suscite chaque jour l'état du monde ?
Répétons-le : en novembre 2008, les espoirs étaient immenses, et démesurés. Barack Obama était alors perçu comme l'opposé de George W. Bush. Le président sortant avait une réputation de cowboy - on tire d'abord, on réfléchit ensuite - agissant à l'instinct, avec une vision simplifiée, voire simpliste, de la géopolitique. Le nouvel élu, lui, était un intellectuel à cheval sur trois continents qui avait développé une conscience aiguë de la complexité du monde. L'infortuné « W » avait malmené la loi et la Constitution, au nom des impératifs imposés par la menace terroriste. Barack Obama, lui, était un professeur de droit pointilleux, opposé aux guerres « stupides » (c'est ainsi qu'il avait qualifié la guerre d'Irak) et lucide sur ce qu'on pouvait attendre de la puissance militaire. En janvier 2009, il prenait les rênes d'une nation frappée par la pire crise financière depuis 1929, avec pour mission de rétablir à la fois la santé économique et la stature internationale du pays. Par sa couleur de peau et par son ascension quasi miraculeuse dans une Amérique héritière de l'esclavage et de la ségrégation, cet homme-là semblait incarner la réconciliation au-delà des divisions ethniques et historiques. Beaucoup furent près de voir en lui un messie des temps modernes qui allait apporter la paix entre pays et régions déchirés par des haines ancestrales. Gagné par ce bel enthousiasme, le comité norvégien lui remit d'emblée le prix Nobel de la paix - une distinction qui ne manqua pas d'embarrasser le commandant en chef de la plus grande armée du monde, alors engagée dans deux guerres.
Six ans plus tard, il est vrai, l'économie américaine affiche de jolis résultats, propres à susciter l'envie de bien des Européens. Mais la reprise n'a pas vraiment …