« Brexit » : le pari risqué de David Cameron

n° 150 - Hiver 2016

La victoire du parti conservateur britannique aux élections législatives du 7 mai 2015 a rendu désormais inévitable l'organisation d'un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne ou sa sortie (« Brexit »). En effet, David Cameron avait promis en janvier 2013 que, s'il remportait les prochaines élections, il engagerait avec ses partenaires européens une renégociation du statut de son pays dans l'UE et qu'il la ferait valider, du moins l'espérait-il, par un référendum d'ici à la fin de 2017.
Ce référendum est inédit dans l'histoire récente de l'Union, sinon dans celle du Royaume-Uni, qui avait déjà voté sur la question en 1975, deux ans seulement après son entrée dans ce qui était alors la Communauté européenne. L'Union européenne a connu des élargissements successifs mais aucun autre pays n'a sérieusement envisagé d'en sortir. Un éventuel retrait représenterait donc un précédent aux conséquences difficiles à prévoir. Dans un contexte de montée du sentiment anti-européen relayé par des partis extrémistes présents dans toute l'Union, les conséquences du scrutin seront perçues bien au-delà des frontières du royaume. L'Union européenne, déjà confrontée aux suites de la crise grecque et à l'arrivée massive de réfugiés, sans parler de l'enjeu sécuritaire lié aux attentats terroristes de novembre 2015 à Paris, doit aussi négocier avec le gouvernement britannique. Il s'agit de lui accorder suffisamment de garanties pour satisfaire le premier ministre et, surtout, une majorité de sa population, sans remettre en question, pour autant, les principes fondamentaux de l'intégration européenne.

Les origines du référendum

Comme souvent en pareil cas, ce référendum tient surtout à des raisons de politique intérieure, même si la crise de la zone euro a joué un rôle dans la poussée récente de l'euroscepticisme outre-Manche. La promesse de Cameron, en janvier 2013, était une réponse aux pressions auxquelles il était confronté depuis plusieurs années, à commencer par celles de son propre parti dont la plupart des membres se montrent très critiques vis-à-vis des institutions européennes. Le tiers environ du groupe parlementaire, soit une centaine de députés conservateurs, a pris ouvertement position pour le « Brexit ». La pression venait aussi du United Kingdom Independence Party (UKIP), qui milite depuis les années 1990 pour un retrait de l'Union. Ses scores électoraux n'ont cessé de progresser lors des scrutins intermédiaires, notamment aux élections européennes de 2014 où il est arrivé en tête. Aux dernières législatives, UKIP n'a remporté qu'un siège à cause du mode de scrutin ultra-majoritaire en vigueur, mais il a fini troisième en nombre de voix, avec 4 millions de suffrages (12 %), confirmant ainsi son implantation dans le paysage politique national. Enfin, dernier facteur pesant sur Cameron, une pétition réclamant un référendum avait recueilli plus de 100 000 signatures parmi la population britannique en 2011 et les sondages montraient en 2012 que l'opinion publique était favorable, à une large majorité, à l'organisation d'un telle consultation. Dans ces conditions, il devenait difficile, voire impossible, de ne pas céder.
David Cameron a donc estimé, pour s'assurer le soutien de son parti et dans l'espoir …

Sommaire

Pour une Europe plus solidaire

Entretien avec Jean-Claude Juncker par Baudouin Bollaert

« Brexit » : le pari risqué de David Cameron

par Pauline Schnapper

Allemagne : le credo de la gauche radicale

Entretien avec Sahra Wagenknecht par Jean-Paul Picaper

Suède : une diplomatie décompléxée

Entretien avec Margot Wallström par Antoine Jacob

États-Unis : les vrais gagnants de la crise financière

Entretien avec Jacques de Larosiere par Jean-Pierre Robin

Erdogan, un allié encombrant

par Marc Semo

La voix des Kurdes

Entretien avec Selahattin Demirtas par Marie Jégo

La grande peur des Serbes de Bosnie

Entretien avec Milorad Dodik par Alexis Troude

Quand Benyamin Netanyahou pense le monde

par Frédéric Encel

Les deux guerres de l'Ukraine

Entretien avec Petro Porochenko par Isabelle Lasserre

En finir avec l'oligarchie ukrainienne

par Sébastien Gobert

Donbass : le Kremlin à la manoeuvre

par Régis Genté

Le meilleur ennemi de Vladimir Poutine

Entretien avec Sergueï Pougatchev par Isabelle Lasserre

Les risques d'une coalition avec la Russie

par Françoise Thom

Syrie : un « protectorat militaire » russe au Levant

par Igor Delanoë

Damas : l'heure de la recomposition

par Thomas Pierret

La difficile quête d'un leadership sunnite

par Christophe Ayad

État islamique : main basse sur le jihad

par Jean-Pierre Perrin

Dix idées reçues sur l'intervention en Libye

par Jean-Baptiste Jeangène Vilmer

Venezuela : la fin du chavisme ?

par Marie Delcas

Australie : les atouts du nouveau premier ministre

par Xavier Pons