Le 6 décembre 1998, un outsider, l'ex-colonel putschiste Hugo Chavez, remportait haut la main l'élection présidentielle vénézuélienne en promettant de refonder les institutions, de lutter contre la corruption et de combattre la pauvreté. Dix-sept ans et vingt élections plus tard, le 6 décembre 2015, son parti, le Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV), et ses alliés subissaient leur premier vrai revers électoral. La Table de l'unité démocratique (MUD), qui réunit les principaux partis d'opposition, de la droite dure à la gauche modérée, a obtenu 112 sièges sur 187 à l'Assemblée unicamérale. La participation a atteint 74,25 %, un record pour une législative. Trois ans après la mort d'Hugo Chavez, sur fond de crise économique sans précédent, la défaite de ses partisans a pris des allures de débâcle. Le président Nicolas Maduro, élu d'une courte tête en avril 2013, s'en trouve fragilisé. Au sein même de son camp, des voix réclament sa démission.
Les dirigeants et les électeurs d'opposition ont le coeur en fête. D'aucuns considèrent que la victoire sans partage de la MUD aux législatives sonne le glas du chavisme. Les plus prudents estiment que la route est encore longue. Le PSUV conserve en effet sa mainmise, plus ou moins serrée, sur l'appareil d'État, l'armée, la justice, les médias et la très puissante PDVSA - la compagnie pétrolière publique qui fait vivre l'économie du pays. Au soir du 6 décembre, le pouvoir a reconnu le résultat électoral mais semble fermement décidé à tout faire pour contrer la victoire de l'« ultra-droite, réactionnaire et putschiste ».
Le système électoral et le découpage des circonscriptions qui, en 2010, avaient privé l'opposition majoritaire en voix d'une majorité à l'Assemblée, ont cette fois-ci servi ses intérêts : avec 58 % des suffrages, la MUD rafle les deux tiers des sièges. Ce score qui élargit ses prérogatives lui ouvre la possibilité d'engager une réforme constitutionnelle ou d'organiser un référendum révocatoire contre le président Maduro. Cette dernière option, prévue par la Constitution de 1999, permet en effet aux électeurs mécontents de se défaire d'un élu à mi-mandat, soit dans le cas de l'actuel président à partir d'avril 2016. C'est probablement la voie qu'envisage le nouveau président de l'Assemblée, le social-démocrate Henry Ramos Allup qui, dès le jour de son investiture le 5 janvier, a déclaré vouloir en finir avec le régime le plus vite possible « dans le respect de la Constitution ».
Démocratique dans la mesure où il repose sur des élections, le régime chaviste est autoritaire en ce qu'il refuse l'existence et le jeu des contre-pouvoirs. La cohabitation entre un président qui incarne la révolution et une assemblée qui relève de la représentation s'annonce pour le moins complexe.
Le contexte international joue contre le pouvoir en place et en faveur d'une transition politique. La révolution bolivarienne a, en effet, perdu ses principaux alliés sur le continent latino-américain. La Havane ayant fait le choix du rapprochement avec Washington (sans consulter Caracas), l'appui cubain s'est fait discret. Empêtrée dans ses difficultés intérieures, la Brésilienne Dilma Rousseff …
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