Le krach ? Quel krach ? Alors qu'à la mi-février 2016 les marchés plongeaient, perdant jusqu'à 20 % en quelques jours, que le prix du pétrole n'en finissait pas de baisser, que l'affolement gagnait les banques et les gestionnaires de fonds, il aura suffi de quelques phrases habilement distillées par les banquiers centraux et d'une rumeur de concertation des grands pays producteurs de pétrole pour que les bourses regagnent, en quelques semaines, le terrain perdu.
Comment expliquer de tels mouvements erratiques ? Comment justifier ces excès de panique, immédiatement suivis d'une exubérance irrationnelle ? Personne, aujourd'hui, n'est en mesure de prévoir l'évolution de l'économie mondiale et des marchés financiers. Pour être clair : il n'y a plus de pilote dans le cockpit. Il y a juste quelques co-pilotes qui réussissent à redresser l'avion quand il pique trop du nez, mais qui se révèlent incapables de négocier un atterrissage en douceur. Et, pendant ce temps-là, les réserves de carburant s'épuisent. Le carburant, c'étaient hier les stimuli budgétaires. Ce sont, aujourd'hui, les stimuli monétaires, entre les mains des banques centrales. Les deux trouvent leurs limites. On ne peut accroître sans cesse les déficits budgétaires. Ni augmenter à l'infini l'endettement, qu'il soit public ou privé. Seul le retour d'une véritable croissance peut effacer les uns et les autres.
Or cette croissance n'est plus au rendez-vous, non seulement en Europe, mais aussi aux États-Unis, et maintenant dans les grands pays émergents comme la Chine. Le FMI vient ainsi de revoir à la baisse sa prévision pour la croissance mondiale en 2016, la ramenant de 3,6 à 3,4 %. L'OCDE, elle, ne s'attend qu'à 3 %. Des taux historiquement bas, d'autant qu'ils intègrent les prévisions officielles chinoises, sujettes à caution.
Cette insuffisance de croissance s'explique par une crise de surproduction globale liée aux mutations technologiques. D'un côté, il y a le monde ancien, celui des usines et de l'économie du XXe siècle. De l'autre, il y a ce monde nouveau du numérique, qui monte très vite en puissance et bouscule les modes de production et de distribution, rendant obsolètes des centaines de millions d'emplois. Le tout est aggravé par une globalisation trop rapide qui met en concurrence les emplois du monde entier à travers un dumping social généralisé. Les délocalisations massives, qui visent à abaisser les coûts de production des entreprises, entraînent toutes sortes de conséquences néfastes : chômage endémique, déclassement, précarité, etc. Ce qui, au bout du compte, se traduit par une baisse du pouvoir d'achat en Occident et, donc, par une diminution de la demande.
Longtemps on a voulu masquer ce phénomène, estimant que le libre-échange était, par principe, gagnant-gagnant. C'était vrai au XVIIIe siècle, à l'époque d'Adam Smith. Cela ne l'est plus aujourd'hui, compte tenu des disparités de salaires entre les différentes régions du monde. La conjonction, dans un laps de temps très court, d'une globalisation sans nuances et de la révolution numérique a provoqué une paupérisation relative des classes moyennes occidentales et japonaises.
Selon le scénario idéal de la « mondialisation …
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