Obama et l'Asie : un bilan mitigé

n° 152 - Été 2016

Dès 2011, le président Obama a déclaré que le « basculement vers l'Asie » serait dorénavant l'axe majeur de la politique étrangère américaine. Dans une région tiraillée entre, d'une part, le malaise qu'avait suscité l'Administration Bush (1) et, d'autre part, l'« offensive de charme » méthodique et efficace de la puissance chinoise (2), cet engagement de l'autoproclamé « first Pacific President of the United States » a suscité autant d'intérêt que d'attente. La redéfinition de la politique américaine en Asie-Pacifique par le binôme Obama / Hillary Clinton (secrétaire d'État de 2009 à 2013) a été perçue comme la promesse d'une réévaluation salutaire - aussi bien sur le plan économique que sur le terrain diplomatico-stratégique.
L'enjeu du pivot était double : d'abord, signaler aux partenaires traditionnels des États-Unis (Japon, Corée du Sud, Taiwan et pays de l'ASEAN (3)) le réengagement concret de la puissance américaine ; ensuite, indiquer qu'en aucune manière Pékin n'avait un blanc-seing en Asie orientale et que si la Chine entendait être considérée comme une puissance « responsable », elle devait se comporter comme telle, c'est-à-dire ne pas échapper aux normes internationales, même dans sa périphérie régionale. Concrètement, il s'agissait pour les États-Unis de retrouver leur leadership naturel dans une zone considérée comme le nouveau pôle mondial du XXIe siècle et où, précisément, ce leadership était le plus sérieusement contesté. À ce titre, la Chine constitue le plus grand enjeu de sécurité nationale pour Washington, celui qui déterminera son positionnement international dans les cinquante prochaines années.
Pour autant, des visites fréquentes, des discours avisés, de légitimes ambitions et des initiatives variées suffisent-ils à faire aboutir une bonne stratégie ? Le marathon diplomatique du président Obama ces derniers mois ne doit pas masquer les insuffisances du pivot. Cinq ans plus tard, le bilan est mitigé. Le recentrage de la diplomatie américaine en Asie n'a jamais convaincu. Ne représentait-il pas, au demeurant, une vue de l'esprit éloignée des responsabilités globales d'une grande puissance ? Au final, le rééquilibrage asiatique se réduit-il à une simple opération de communication qui aurait fait long feu ? Quelle sera son empreinte durable sur le rapport de forces en Asie-Pacifique ?

Obama, le pivot et l'Asie orientale

« Here, we see the future »
C'est en novembre 2011, devant le Parlement australien, que le président Obama explique la logique à laquelle répond la « stratégie du pivot » (il utilise alors le terme de « rebalancing ») annoncé au même moment par Hillary Clinton dans son fameux article de Foreign Policy (4) : puisque c'est en Asie-Pacifique que les États-Unis voient l'avenir du monde, il est urgent d'y réaffirmer leur présence dans une perspective durable. Le pivot illustre la prise de conscience par les Américains de dynamiques puissantes qui se mettent en place et leur échappent. L'Asie est désormais largement centrée sur la Chine, ce qui représente indéniablement pour les États-Unis un défi complexe ; mais, dans le même temps, le continent possède un potentiel colossal en termes de croissance économique, de commerce international et d'innovation. À ce constat, Washington tente d'apporter une réponse globale et constructive. Une réponse susceptible de satisfaire à la fois les intérêts américains et les attentes, parfois contradictoires, de ses alliés, mais aussi de la Chine (5). L'élan est là et les États-Unis veulent en profiter - voire, idéalement, piloter sa structuration. Le pivot, c'est la recherche de nouveaux équilibres dans un contexte régional où les Américains ne détiennent plus le monopole de la force - ni hard, ni soft -, ni peut-être même le leadership.
La Chine restructure l'Asie
Quand Barack Obama arrive à la Maison-Blanche, l'Asie est en pleine réorganisation après avoir essuyé deux crises successives : la crise régionale de 1997 et la crise mondiale de 2008. On le sait, l'Asie orientale a réagi très différemment à ces deux perturbations. Cette différence tient principalement à la Chine. Au contraire des États-Unis, qui n'ont pas été perçus comme des soutiens solides et fiables lors des fortes turbulences de 1997-1998, Pékin a proposé des actions concrètes, audacieuses, notamment le fameux accord de libre-échange avec l'ASEAN (2000). Avec des résultats rapides : la croissance chinoise est devenue la planche de salut des économies régionales. Entre 2000 et 2010, la Chine s'est positionnée comme le premier partenaire commercial de la Corée du Sud, de l'ASEAN et même du Japon. L'effet « locomotive » a joué à plein qui, en arrimant plus fermement les économies asiatiques aux dynamiques sino-centrées, a éloigné ces économies des partenariats traditionnels (États-Unis, Europe) et les a rendues plus résistantes à la conjoncture mondiale. Le power shift, le déplacement des centres de puissance, est en marche.
Ce phénomène est provoqué en partie par les réponses inadaptées des États-Unis à la crise structurelle de 1997, mais aussi par l'attractivité et la prodigalité d'un modèle chinois reposant sur des dynamiques économiques qui ne s'embarrassent ni de contraintes politiques ni de contraintes sociétales - ce que certains experts ont qualifié de « consensus ultra-pragmatique de Pékin » (6) et que la Chine serait tentée d'ériger en modèle de gouvernance. Un ambassadeur de l'un des pays de l'ASEAN confirme : l'agitation du spectre de la « menace chinoise » semble « un peu grotesque » et même déplacée « car la réalité s'impose : la Chine est notre voisine tandis que les États-Unis se trouvent de l'autre côté de l'océan ». La promesse d'un horizon favorable à ses intérêts a renforcé la confiance de Pékin dans sa capacité à convertir son attractivité économique en rayonnement géostratégique.
D'une certaine façon, c'est bien Pékin qui, en lançant une politique très active en Asie orientale à travers des initiatives incessantes, contraint Washington à une position de suiveur (7) : un dispositif multi-terrain (commercial, financier, diplomatique, éducatif et scientifique...) assure le bon fonctionnement d'un réseau d'influence « amical » qui ne faiblit pas. À titre d'illustration, la Chine a été le premier partenaire de l'ASEAN à signer le Traité d'amitié et de coopération (TAC) en octobre 2003 et à établir des liens de partenariat stratégique (Indonésie, Malaisie, Corée du Sud...) ; elle a également été la première puissance nucléaire prête à signer les différents documents sur la Zone exempte d'armes nucléaires en Asie du Sud-Est (juillet 2012). De nombreux pays d'Asie ont des accords de commerce avec Pékin.
Le « rebalancing » américain s'inscrit dans ce contexte échevelé. S'il est justifié par les opportunités que recèle ce nouveau « centre du monde », il se nourrit donc aussi d'une sourde inquiétude. Non seulement les évolutions asiatiques ont un impact direct et croissant sur les dynamiques américaines en relativisant leur part dans les flux mondiaux (commerciaux, monétaires, sécuritaires mais aussi éducatifs et culturels...) et en affectant les données domestiques (emploi, finances publiques...) mais, par surcroît, les États-Unis risquent de perdre leur influence structurante sur cet espace. Washington n'a pas vraiment d'autre choix que celui du réengagement en Asie orientale - une fois acté, affirme l'Administration démocrate, le retrait du Moyen-Orient (Irak) et d'Asie du Sud (Afghanistan).
À moyen terme, l'équipe réunie autour du président Obama craint que le poids de la Chine ne reconfigure le système international issu de la Seconde Guerre mondiale en affranchissant l'Asie de certaines normes que Pékin jugerait trop contraignantes et en proposant aux pays de la région des modèles de croissance et de gouvernance fort différents des modèles occidentaux, aussi bien en termes économiques que politiques. L'un des objectifs implicites du pivot consiste à inciter la région, et la Chine, à souscrire aux normes et aux lois internationales en vigueur. Cet enjeu normatif est apparu clairement quand Barack Obama a tenté - en vain - de dissuader les pays asiatiques de contribuer à la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures, inquiet de voir cette nouvelle institution saper les fondements des normes de « bonne gouvernance » défendues par les institutions internationales comme le FMI ou la Banque mondiale (8). C'est le même type d'argument que le président a utilisé pour rappeler que « les États-Unis ne laisseront pas des pays comme la Chine fixer les règles du commerce mondial » à l'occasion de la signature du Transpacific Partnership (TPP, voir infra).
Les doutes initiaux
Si l'annonce Obama/Clinton tombe au bon moment et résonne agréablement en Asie, c'est aussi parce que la proximité de la Chine peut paraître pesante même si cela n'est jamais exprimé ouvertement. En outre, les effets concrets de la puissance militaire chinoise et le discours nationaliste des autorités de la RPC inquiètent. La perspective d'un « rebalancing » américain a donc donné aux pays d'Asie des arguments dans leurs négociations avec Pékin dans la mesure où elle leur a permis de ne plus être enfermés dans une relation asymétrique pesante.
D'emblée, toutefois, l'Asie doute. Les États-Unis ont-ils la capacité de réaliser ce pivot ? Si oui, ce réengagement est-il appelé à durer ? Plus fondamentalement, le choix tactique de Washington est-il pertinent ? Les pays asiatiques connaissent les limites de la politique d'« endiguement » : à leurs yeux, ce n'est pas l'option la plus appropriée pour gérer leurs relations avec Pékin. Les sondages réalisés à cette époque sont sans équivoque : à une immense majorité, les sociétés ne croient pas à une « vague de fond » américaine ; les élites, en revanche, appuient ce rééquilibrage.
Dans les faits, le « rebalancing » n'a pas été la vague de fond annoncée pour trois raisons essentielles qui ont dès le départ nui à sa cohérence. Primo, cette politique supposait une réorientation globale difficile à effectuer dans le temps court d'un mandat, même renouvelé ; si l'on a observé une coopération renforcée sur les dossiers asiatiques entre les différents ministères et services américains (notamment le Département d'État et le Pentagone), le pivot ne s'est pas pour autant inscrit dans une stratégie construite et les décisions ont été prises au cas par cas, sans lisibilité évidente. Secundo, parce que le principe de réalité, notamment financière (déficit) et stratégique (malgré le désengagement d'Irak, Washington demeure impliqué au Moyen-Orient), l'a rapidement emporté, détournant l'attention des enjeux asiatiques. Tertio, parce que Pékin a laissé le président Obama s'embourber dans ses propres contradictions tout en poursuivant sans relâche l'objectif de renaissance de la notion chinois, y compris dans sa dimension internationale. Et l'ambition de Barack Obama consistant à s'entendre avec la RPC pour élaborer des solutions « justes » et « gagnant / gagnant » a fini par s'épuiser face à une Chine imperturbable.
C'est particulièrement vrai depuis l'arrivée à la présidence de Xi Jinping (mars 2013), qui n'a pas eu besoin de faire allusion au pivot pour promouvoir le « rêve chinois », c'est-à-dire la grandeur et la puissance de la RPC au coeur d'une « communauté de destin » asiatique. L'initiative d'une Route de la soie moderne - le projet « One Belt, One Road » (OBOR) - séduit ses voisins et a été qualifiée, un peu rapidement, de « plan Marshall chinois pour l'Asie » (9). Dans le même temps (octobre 2013), le président Obama annulait ses voyages dans la région et sa participation au sommet de l'APEC à Jakarta pour cause de shutdown (10) et était remplacé par le secrétaire d'État Kerry, bien moins à l'aise en Asie que Hillary Clinton, qui l'avait précédé à ce poste.

Le bilan en demi-teinte du pivot américain

Des partenariats réactivés
La stratégie du pivot comporte une dimension économique et commerciale très marquée. La question est simple : les États-Unis sont-ils capables de regagner des parts de marché alors que leur position en Asie s'effrite depuis le début des années 2000 (11) ? Après avoir rejoint, en même temps que la Russie, le Sommet de l'Asie de l'Est en 2011 (dialogue destiné à promouvoir les discussions sensibles dans l'espace asiatique), Washington dévoile sa carte maîtresse, le TPP (Transpacific Partnership), un nouvel accord de libre-échange que la Chine ne peut rejoindre sans modifier ses propres règles commerciales. Signé le 5 octobre 2015 par les représentants de douze pays (États-Unis, Canada, Mexique, Chili, Pérou, Japon, Malaisie, Vietnam, Singapour, Brunei, Australie et Nouvelle-Zélande) qui pèsent, ensemble, 40 % du PIB mondial et 35 % des échanges commerciaux, le TPP recouvre un nombre sans précédent de domaines, des droits de douane à la propriété intellectuelle en passant par les investissements, les services, les droits de l'homme et l'environnement. « Un accord consoliderait le leadership des États-Unis en Asie et, de concert avec les négociations concernant un accord de libre-échange en Europe, placerait les États-Unis au centre d'un grand projet : celui qui permettrait de rédiger les règles qui gouverneront l'économie mondiale pour le siècle prochain », affirmait Thomas Donilon dans un article du Washington Post (12). Le président Obama souhaiterait que le traité soit mis en oeuvre le plus tôt possible afin de contraindre Pékin à négocier une éventuelle adhésion selon les termes américains, mais les processus de ratification, qui n'ont pas encore débuté, s'annoncent difficiles, en particulier aux États-Unis et au Japon ; en Asie, notamment dans les économies « étatistes » comme celle du Vietnam, certains dénoncent une alliance « contre nature ». La Maison-Blanche aurait-elle vu trop grand au risque de mettre en péril ses ambitions ? Tandis que la Chine propose des partenariats privilégiés apparemment dénués de conditions politiques, Washington, à l'inverse, assortit le TPP de règles excessivement contraignantes, notamment en ce qui concerne les normes environnementales, le droit du travail, l'échange de données ou la propriété intellectuelle.
La Chine, dont le montant des échanges commerciaux avec les pays signataires est supérieur à celui de leur commerce avec les États-Unis, a lancé, de son côté, l'initiative RCEP (Regional Comprehensive Economic Partnership), puis la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures, et enfin les Routes de la soie (terrestre et maritime) : tout un ensemble de projets convergents qui concurrencent l'ordre libéral américain. La RPC aura beau assurer qu'elle ne met en place ces instruments que pour consolider les dynamiques régionales et contribuer ainsi à une Asie plus prospère et plus sûre, son agenda caché - ou perçu comme tel par Washington - est de défier la primauté américaine et de s'imposer au coeur d'un nouvel ordre économique.
La vraie question est donc de savoir si le TPP sera capable d'endiguer la baisse du commerce et de la présence économique et financière des États-Unis en Asie orientale. Rien ne l'indique à ce jour. Les chiffres sont incontestables : bien que les importations asiatiques aient augmenté de 261 % entre 2000 et 2014 (de 1,5 à 5,4 trillions de dollars), la part des États-Unis dans ces importations a chuté de 46 % tandis que la Chine a été le principal bénéficiaire de cette envolée (13) (la part de la France n'a reculé « que » de 16 % selon le même rapport). En 2000, les exportations américaines représentaient 12,3 % des importations asiatiques ; en 2014, ce ratio était tombé à 6,6 %. Sur cette période, les États-Unis sont (après le Japon) le pays qui affiche la baisse la plus brutale en termes de parts de marché en Asie.
Sur le plan politique et diplomatique, le réseau d'alliances américain a été relancé et élargi - « modernisé » selon la formule du Département d'État. Relancé, donc, avec le Japon, la Corée du Sud (un allié particulièrement attiré par Pékin), Taiwan, la Malaisie, Singapour ou encore les Philippines. En outre, le Vietnam, l'Indonésie, le Myanmar et l'Inde sont désormais considérés comme des partenaires avec lesquels les États-Unis doivent consolider les rapprochements en cours : Narendra Modi, le premier ministre indien, aura visité les États-Unis à quatre reprises entre 2014 et 2016. La transition politique au Myanmar et les élections de 2015 ont été présentées comme un succès pour Washington, soucieux de voir le processus démocratique se dérouler correctement. Le président Obama mais aussi le vice-président Joe Biden ou le secrétaire d'État John Kerry ont multiplié les déplacements en Asie orientale. Par la suite, Washington (après la Chine) nomme un ambassadeur auprès de l'ASEAN ; Barack Obama invite même les dirigeants des dix pays membres à Sunnylands (Californie) pour deux jours de discussions informelles (février 2016). Partout, le message est martelé : « En tant que nation du Pacifique, les États-Unis joueront à terme un plus grand rôle dans l'organisation de cet espace. »
Mais sur ce terrain-là aussi, le doute gagne : des différences politiques s'expriment ; des tensions diplomatiques fragilisent les rapprochements entre les États-Unis et leurs alliés asiatiques ; et, au sein même de l'espace asiatique, le retour des tentations nationalistes (14), avivées par des différends territoriaux non résolus (15), suscite l'inquiétude. Shinzo Abe, premier ministre du Japon, refuse l'idée d'un « basculement » provoqué par l'antagonisme chinois. Il ne serait pas opposé à la reformulation d'un ordre nouveau dans la région, estimant que, dans le système actuel, le Japon a un rôle marginal et subalterne (16). Même son de cloche à Séoul où la présidente Park Geun-Hye entend ne pas avoir à choisir entre son voisin chinois et l'allié américain. Les pays d'Asie du Sud-Est, pour leur part, redoutent les pressions « droits de l'hommistes ». En dépit des efforts déployés par la Maison-Blanche afin de rassurer le Vietnam, ce « vieil ennemi devenu ami » (17), le Parti communiste craint les changements socio-politiques induits par le rapprochement avec Washington. Hanoi apprécie l'appel d'air américain qui lui permet de sortir de son face-à-face avec le grand voisin chinois (18), mais n'optera pas pour une alliance trop étroite. L'accueil en grande pompe à Washington du secrétaire général du Parti communiste vietnamien, Nguyen Phu Trong, le 7 juillet 2015, ou la visite du président Obama à Hanoi en mai 2016 n'ont pas changé la donne : le PCV veut contrôler les effets induits de l'entente avec les États-Unis, quitte à en limiter la portée. En Malaisie, on doute : alors que Pékin et Manille s'entendent pour renforcer leur partenariat stratégique global, le président Obama s'est rendu deux fois dans la Fédération en vingt mois (la dernière visite d'un président américain, le président Johnson, datait de 1966). Le fait précisément que le démocrate Obama propose à son tour un partenariat stratégique avec un régime affaibli et un premier ministre, Najib Razak, contesté sur le plan intérieur après une série de scandales (19), paraît incohérent avec la transition démocratique prônée par les Américains : un sondage réalisé en 2015 montre que, à une large majorité (54 %), la population malaisienne ne soutient pas le réengagement américain, critique le TPP (38 %) et n'adhère pas au scénario d'une menace grandissante d'un nouvel hégémon brandie par Washington (20).
Une suprématie militaire défiée en Asie-Pacifique
Si le volet militaire n'était que le troisième volet du pivot, il est rapidement passé au premier rang : après le désengagement des années Bush, c'est sur ce terrain que les résultats sont aujourd'hui les plus probants - au point que les détracteurs du président américain évoquent un « pivot vers la guerre » (21). La montée en puissance militaire de la RPC et la modernisation de son armée (22) contraignent Washington, ainsi que les États de la région (23), à un effort sans précédent dont la compatibilité avec l'esprit du « pivot » pose question. On constate cependant que même s'ils ont étoffé leur réseau d'alliances et renforcé leur présence, les États-Unis n'ont réglé aucun des grands problèmes sécuritaires de la zone tandis que la Chine, elle, a singulièrement conforté ses positions, et apparaît comme l'acteur clé dans la résolution des conflits asiatiques (24). Provocation audacieuse : Xi Jinping est même allé jusqu'à affirmer, en mai 2014, que « la sécurité en Asie doit être assurée par les Asiatiques eux-mêmes » (25).
Le redéploiement américain s'est effectué à partir d'un réseau de bases et de points d'appui renouvelé. Le partenariat stratégique est confirmé avec l'Australie (1 250 premiers soldats américains sont arrivés sur la base de Darwin, soit 50 % des effectifs prévus d'ici à 2017), avec le Japon et avec la Corée du Sud (où les Américains ont soutenu la construction de la base navale de Jeju, achevée en 2015). Après un « Mémorandum de promotion de la coopération bilatérale en matière de défense » avec le Vietnam (2011) et un accord de coopération renforcée avec les Philippines qui donne aux Forces armées américaines accès à cinq bases militaires locales (26) (avril 2014), c'est avec Singapour que les États-Unis se sont engagés à approfondir leur accord de défense (Defence Cooperation Agreement, décembre 2015). En 2016, l'Inde accepte de renforcer la coopération logistique entre les deux pays (27) - une coopération que le Pentagone aimerait voir évoluer vers un « partenariat stratégique ».
L'effort militaire américain se traduit par plusieurs effets concrets. La présence régulière de l'US Army s'est accrue (il est prévu que 60 % des forces navales seront basées dans le Pacifique d'ici à 2020) (28) ; de nouveaux concepts militaires (Air-Sea Battle) visant à pallier la faiblesse induite par la distance (29) ont été élaborés ; des exercices communs (bilatéraux et régionaux (30)) ont été conduits ; les ventes de matériel militaire, quoique très inégalement réparties, ont augmenté (31) ; les FONOP (Freedom of Navigation Operations) sont devenues plus fréquentes en mer de Chine du Sud ; quant à la coopération anti-terroriste, elle s'est évidemment renforcée. Dans un souci d'affichage et pour marquer le terrain, les déploiements se succèdent à une vitesse accélérée dans le Pacifique, dans l'océan Indien, en mer du Japon et en mer de Chine du Sud. Depuis 2012, les Américains patrouillent régulièrement autour des îles Spratleys, une zone que se disputent la Chine, les Philippines, le Vietnam, la Malaisie et le sultanat de Brunei ; l'envoi à proximité de ces îles d'un torpilleur équipé de missiles appuyé par des avions de surveillance en octobre 2015 a évidemment été dénoncé par les autorités chinoises qui continuent leurs opérations de remblaiement et de construction d'infrastructures sans que les questions territoriales ne soient traitées. Un phare chinois a été inauguré en avril 2016 sur le récif de Subi. Le Pentagone craint à présent que les Chinois établissent une Zone d'identification de défense aérienne comme ils l'ont fait en mer de Chine orientale en 2013.
Ce pivot sécuritaire est-il efficace ? Et, question sensible en Asie, est-il fiable ? D'un côté, il rassure les États de la région qui ne veulent pas laisser le champ libre aux visées chinoises : les États-Unis restent dans leur rôle de garantie du dernier recours. D'un autre côté, on l'a dit, le retour de la puissance américaine n'a en aucune façon infléchi la détermination de la Chine ou de la Corée du Nord, voire amélioré la sécurité des pays alliés. Les experts rappellent qu'aux Philippines, en dépit de la mise en service d'une « Force interarmées d'opérations spéciales », soutenue en termes de formation et d'équipement par les États-Unis (32), la dernière attaque du groupe terroriste (affilié à l'EI) Abu Sayyaf, le 9 avril 2016, a tué dix-huit soldats, et l'organisation détient toujours vingt otages étrangers. Sur les abcès sécuritaires régionaux, le président américain a fait preuve d'une « patience stratégique » que ses détracteurs comparent à de la faiblesse, de l'indécision ou de l'angélisme. Pyongyang a procédé à trois essais nucléaires (2009, 2013, 2016) et poursuit ses recherches. Depuis 2010, la Chine, on l'a dit, a remblayé et construit des infrastructures portuaires et aéronavales au coeur des archipels des Spratleys et des Paracels (la superficie de Fiery Cross, un des atolls, a été multipliée par dix (33) !). En mai 2016, elle a annoncé une intensification de ce programme. Évidemment, l'Administration Obama a dénoncé ce processus susceptible de « permettre un contrôle chinois de ce passage international » (la moitié du fret mondial transite par la mer de Chine du Sud), mais elle n'a jamais clairement fixé de ligne rouge ; de facto, et avec un sens achevé de l'opportunisme, Pékin s'emploie à repousser une telle ligne rouge puisque ces installations renforcent son pouvoir de négociation. L'experte américaine Bonnie Glaser estime que la Chine procède par « petits pas dont aucun ne mérite un casus belli mais qui, accumulés, transforment la donne stratégique » (34). Le cas de la mer de Chine méridionale est inquiétant à plus d'un titre pour le pivot américain et, plus largement, pour le rapport de forces en Asie : non seulement la Chine ne montre aucune propension au compromis, ni même à la retenue, mais l'analyse attentive du comportement américain pourrait l'inciter à reproduire ailleurs la même tactique. Les dossiers syrien et ukrainien lui donnent en partie raison sur ce point. Et cette attitude a été confirmée sur le terrain asiatique : durant les phases de tension avec les Philippines, avec le Vietnam et même avec le Japon (à propos des îles Diaoyu/Senkaku), les forces américaines n'ont pas bougé, craignant d'envoyer un message « disproportionné ». Comment une telle pusillanimité ne donnerait-elle pas à réfléchir ?

Quelle politique pour le prochain président ?

L'héritage de Barack Obama en Asie orientale est complexe et foisonnant ; mais comme le grand virage annoncé n'a pas eu lieu, son bilan est plus difficilement lisible. L'accélération des visites, accords et engagements observée ces derniers mois montre que le président sent qu'il a encore besoin de convaincre. Au final, la vraie question est celle de la relation avec la RPC et de la perception d'une puissance chinoise à la fois attirante et incontournable ; in fine, cette relation ne laisse aux États-Unis qu'une marge de manoeuvre étroite entre coopération (« accompagnement » dit-on dans les chancelleries) et fermeté. Si le pivot a ralenti l'érosion de l'influence américaine en Asie de l'Est, il n'a pas empêché la contestation de la suprématie des États-Unis ni répondu à cette question majeure : faut-il intégrer la Chine au système existant ou travailler avec elle à l'élaboration d'un nouvel ordre mondial ? Comme l'a observé le ministre singapourien de la Défense, Ng Eng Hen, au dernier Dialogue Shangri-La, la véritable question aujourd'hui pour la sécurité de la région est celle du maintien du statu quo (option préconisée par les États-Unis) ou celle de la renégociation de ce statu quo (option recherchée par la Chine, étant entendu que cette renégociation prendrait en considération la maturation de la puissance chinoise, ainsi que l'influence et le statut qui vont avec). Au demeurant, cette question dont le principal champ d'action est l'Asie aura des répercussions immédiates sur l'ensemble du système mondial. Le pari de Pékin est que ce nouvel ordre est de toute façon en préparation et que le temps et l'Histoire vont dans son sens.
Ce pari pourrait se révéler tout à fait exact avec l'arrivée de la prochaine administration. Car si le président Obama restera celui qui, en 2011, a formalisé le basculement américain vers la « nouvelle Asie » avec confiance, rien n'indique à ce stade que le prochain hôte de la Maison-Blanche persévérera dans cette voie. Or ce qui inquiète les alliés américains en Asie, c'est précisément l'affaiblissement de la puissance américaine dont certains pays tirent déjà avantage.
La campagne électorale et l'Asie
À l'exception de la Chine, diabolisée par Donald Trump qui la présente comme l'une des grandes responsables des maux de l'Amérique, l'Asie orientale n'est que peu présente dans les débats. Ni les Républicains ni même les Démocrates ne sont très explicites sur l'avenir qu'ils réservent au « pivot » lancé par le président sortant.
Pour Donald Trump, le retour à la grandeur américaine ne passe pas obligatoirement par l'Asie et le « China bashing » est payant auprès des électeurs. Sur le projet de libre-échange, le candidat républicain n'a pas mâché ses mots en qualifiant le TPP de « folie » et de « désastre » : à ses yeux, cet accord a été mal négocié et devrait être abandonné. Ouvrir une guerre commerciale avec la Chine ne lui fait pas peur « puisque Pékin vole des emplois productifs aux États-Unis, et entretient un déficit commercial (500 milliards) qui affaiblit considérablement l'Amérique et sa base industrielle » ; la Chine, mais aussi le Japon et le Vietnam sont accusés de se livrer à une concurrence déloyale en manipulant leur monnaie afin de rendre leurs produits à l'exportation plus compétitifs que ceux des États-Unis. Au-delà de cette rhétorique d'ordre économique, Donald Trump multiplie les simplifications réductrices sur les États de la région, ce qui suscite dans les pays concernés une certaine préoccupation : l'Indonésie, pays de « bascule » stratégique entre les océans Indien et Pacifique, s'indigne des propos anti-musulmans tenus par le magnat de l'immobilier ; la Malaisie fait de même ; quant au Japon, il est effrayé par son discours sur « les alliances du passé » induisant une remise en cause des liens privilégiés entre Tokyo et Washington ; de même, à Taiwan on s'interroge sur la fiabilité de la protection américaine en cas de présidence Trump.
Si les pays d'Asie s'inquiètent de l'ignorance des complexités asiatiques qu'affiche le candidat Trump, ils lui reconnaissent toutefois un certain pragmatisme d'homme d'affaires qui, espèrent-ils, devrait prévaloir en matière économique s'il venait à être élu. Sur les questions sécuritaires et politiques, les positions divergent entre, d'une part, les alliés de Washington qui se demandent ce qu'il adviendra du réseau d'alliances des États-Unis en Asie si Trump accède à la Maison-Blanche et, d'autre part, la Chine qui tirerait avantage d'une réduction de la présence militaire américaine au Japon ou en Corée du Sud - or le candidat républicain a promis que cette réduction aurait lieu si Tokyo et Séoul refusaient de financer une partie des frais. Mais dans un tel cas de figure, les Japonais et les Sud-Coréens pourraient être tentés d'assurer leur propre protection ; Donald Trump a même suggéré que le Japon et la Corée du Sud se dotent de leurs propres arsenaux nucléaires.
Pour les raisons inverses, la candidature de la démocrate Hillary Clinton est perçue moins favorablement par Pékin et plus positivement par les alliés traditionnels des États-Unis, qui l'ont très souvent accueillie lorsqu'elle était secrétaire d'État (elle compte pas moins de 61 visites officielles en Asie à son actif). Hillary Clinton a largement contribué à la formulation du pivot, elle en connaît les enjeux ; hors de question, pour la candidate démocrate, de remettre en cause un système qui fait la part belle à la puissance américaine et à son rôle « irremplaçable ». Sa position sur le TPP, qu'elle juge « dangereux pour les familles américaines » (35), est généralement qualifiée de simple posture électorale ; les experts estiment que, si certains amendements étaient renégociés, l'esprit général du TPP serait maintenu et Mme Clinton accepterait sa mise en oeuvre. Surtout, la candidate démocrate veut garantir la liberté de navigation et de survol dans cette zone cruciale pour les flux mondiaux.
À moyen terme, au-delà des enjeux électoralistes, la crédibilité américaine est engagée et, avec elle, la cohérence d'un modèle que Washington a proposé, si ce n'est imposé, à ses alliés depuis plusieurs décennies. La pression chinoise, constante, polymorphe, contraint les Américains à une cohérence difficile à tenir. Face à la tentation isolationniste, certains experts n'hésitent plus à évoquer la « trahison » américaine car si les États-Unis peuvent survivre sans leurs alliés, l'inverse, pour l'instant, n'est pas vrai. Pis : ils vont même parfois jusqu'à dire que, du fait de cette incertitude, les États-Unis introduisent plus d'instabilité que d'apaisement dans l'espace asiatique.
Quoi qu'il en soit, le prochain chef de l'exécutif américain devra répondre aux questions laissées en suspens par Barack Obama, en particulier sur la nature des relations Washington-Pékin : coopération ou compétition dans l'élaboration d'un nouvel ordre mondial ?
De son côté, Pékin dispose certainement dans ses cartons de quelques initiatives à proposer aux pays d'Asie - des initiatives qui ne viseront pas directement à anéantir leurs relations avec leur grand allié américain mais qui contribueront à affaiblir, plus encore, les positions de celui-ci. C'est pourquoi - répétons-le - celui ou celle qui succédera à Barack Obama ferait bien de réfléchir à cette question de fond pour apporter une réponse intelligente et créative. Si l'on s'en tient aux débats publics en cours, on est loin du compte.

(1) Entre autres, l'obsession de l'Administration Bush à l'égard de la guerre contre le terrorisme avait été considérée en Asie comme disproportionnée - au-delà du fait qu'elle heurtait les sensibilités des populations musulmanes d'Asie du Sud-Est ; le Japon et la Corée du Sud n'avaient pas été satisfaits du traitement par cette administration de la présence militaire américaine ; le régime nord-coréen avait déjoué le plan d'action en vue d'un désarmement nucléaire ; et la Chine a continué sa poussée tous azimuts.
(2) Sur le sujet, se référer à Chris Johnson (dir.), Decoding China's emerging great power strategy in Asia, CSIS, juin 2014.
(3) Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam.
(4) Hillary Clinton, « America's Pacific Century » Foreign Affairs, novembre 2011.
(5) Chi Wang, Obama's challenge to China : the pivot to Asia, Routledge, New York, 2015.
(6) Reza Hasmath, « White Cat, Black Cat or Good Cat : The Beijing Consensus as an Alternative Philosophy for Policy Deliberation ? The Case of China », Barnett Papers in Social Research, Université d'Oxford, novembre 2014.
(7) À titre d'illustration, la Chine a été le premier partenaire de l'ASEAN à signer le Traité d'amitié et de coopération (TAC) en octobre 2003 et à établir des liens de partenariat stratégique (Indonésie, Malaisie...) ; elle a également été la première puissance nucléaire prête à signer les différents documents sur la Zone exempte d'armes nucléaires en Asie du Sud-Est (juillet 2012). De nombreux pays d'Asie ont des accords de commerce avec la Chine.
(8) L'administration Obama a donc subi une défaite diplomatique humiliante quand 57 pays, dont des alliés proches de Washington, ont signé leur participation à la BAII (juin 2015).
(9) Vassilis Ntousas, « Back to the Future : China's "One Belt, One Road" Initiative », FEPS Policy Brief, mars 2016 ; Kyle Churchman, « China's vision for a new Asian economic and political Order », National Bureau of Asian Research, décembre 2015.
(10) Faute de s'entendre sur un budget pour l'exercice 2014, plusieurs administrations et services fédéraux ont fermé à l'automne 2013, provoquant la paralysie du service public américain.
(11) Avec l'ASEAN, par exemple, les États-Unis ont perdu 6 points entre 2000 et 2010, passant de 15 à 9 % du commerce extérieur de l'Association.
(12) Thomas Donilon, « Obama is on the right course with the pivot to Asia », Washington Post, 20 avril 2014.
(13) Jay Chittooran, « Losing Ground in Asia : Why the U.S. Export Market Share Has Plummeted », Third Way, 5 août 2015, http://www.thirdway.org/report/losing-ground-in-asia-why-the-us-export-market-share-has-plummeted
(14) En dépit de la « déception du département d'État », Shinzo Abe n'a pas renoncé à se rendre au temple Yasukuni ; en outre, les relations entre les deux alliés des États-Unis - Japon et Corée du Sud - se sont franchement dégradées sous l'administration Obama.
(15) Sur les différends territoriaux maritimes en Asie orientale, cf. Volker Stanzel, « Danger in the high seas : the East Asian Security Challenge », ECFR, 22 janvier 2016.
(16) Céline Pajon (dir.), « L'alliance nippo-américaine à l'horizon 2030 : structure, dynamique, évolution », Notes de l'IFRI, Centre Asie-IFRI, 24 février 2016.
(17) « US and Vietnam : from foes to friends », The Diplomat, 24 mars 2015.
(18) Le Hong Hiep, « The Vietnam-US-China Triangle : new dynamics and implications », Perspective, n° 45, ISEAS, Singapour, 25 août 2015.
(19) Elsa Lafaye de Micheaux, « La Malaisie de Najib Razak : solidité économique sur fonds de tensions politiques », Centre Asie-IFRI, Visions 85, avril 2016.
(20) Pew Research Center, 2015 Global Attitude Survey.
(21) « The US Pivot to Asia is a pivot to war », US Peace Council, http://uspeacecouncil.org/?p=2761
(22) L'Armée populaire de libération poursuit sa modernisation, bénéficiant d'un budget qui augmente depuis 1989 plus rapidement que le PIB pour se fixer à 215 milliards de dollars en 2015 (selon le rapport 2015 du SIPRI).
(23) Cf. IHS Jane defence budgets annual report 2015 et Deloitte, Tension, Collaboration and Convergence : Asia Pacific Defense in 2015, https://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/nz/Documents/public-sector/en-gv-asia-pacific-defense-outlook-2015-100315.pdf
(24) Qu'il s'agisse des enjeux en mer de Chine du Sud, du différend territorial avec le Japon ou la Corée du Sud, ou encore de la poursuite du programme nucléaire nord-coréen.
(25) Zhang Yu, « Xi defines new security vision at CICA », Global Times, 22 mai 2014.
(26) Cet accord révise les clauses du traité de défense mutuelle de 1951. En l'occurrence, Manille autorise pour une période de dix ans le déploiement temporaire de moyens militaires américains sur le sol philippin ainsi que la possibilité d'y prépositionner du matériel en cas de nécessité. La coopération de défense américano-philippine a été singulièrement renforcée pendant la présidence Aquino (2011-2016).
(27) Cet accord permettra aux forces américaines de fournir du carburant ou des pièces d'équipement à l'armée indienne, durant les exercices militaires communs de plus en plus fréquents des deux armées. Il est également prévu que les marines américaine et indienne patrouilleront conjointement dans les océans Indien et Pacifique dans un « avenir assez proche ».
(28) Le renforcement de la présence américaine dans la zone Indo-Pacifique a été réaffirmé en mars 2015 par la publication de la mise à jour du document « A cooperative strategy for the 21st Century Seapower ».
(29) Ce nouveau concept opérationnel - l'Air-Sea Battle - s'accompagne de la mise en service de ravitailleurs aériens, d'avions de surveillance et de lutte anti-sous-marine et de détachements de Coast Guard à partir du réseau de bases et de points d'appui militaires dans la zone.
(30) Parmi les plus importants, on citera les exercices Talisman Saber (avec l'Australie), Cobra Gold (Thaïlande, Indonésie, Japon, Malaisie, Singapour, Corée du Sud et, pour la première fois en 2015, Chine), Balikatan (Philippines, Australie), Carat (Bangladesh, Brunei, Cambodge, Philippines, Singapour, Thaïlande et Malaisie) ou RIMPAC (23 pays participants dont la Chine).
(31) Un papier éclairant de Joshua Kurlantzick montre que l'aide militaire à l'Asie du Sud-Est a été réduite de 19 % depuis 2010. Seuls le Laos, le Vietnam et le Myanmar ont reçu plus d'aide en 2015 qu'en 2010 ! Le 9 mai 2016, la Maison-Blanche annonçait même que le président Obama étudiait la possibilité de lever totalement l'embargo sur les ventes d'armes au Vietnam. Joshua Kurlantzick, « Rebalance to Asia led to drop in security assistance for Southeast Asia », Council on Foreign Relations, 22 avril 2016.
(32) Cf. Linda Robinson, Patrick B. Johnston et Gillian S. Oak, US Special Operations Forces in the Philippines 2001 - 2014, Santa Monica, Rand Corporation, 2016.
(33) Ruper Wingfield-Hayes, « China's Island Factory », BBC, 9 septembre 2014, le reportage le plus lisible sur la question. La Chine a annoncé en mai 2016 qu'elle continuerait les constructions.
(34) Bonnie S. Glaser et Deep Pal, « Is China's Charm Offensive dead ? », China Brief, The Jamestown Foundation, vol. 14, issue 15, 31 juillet 2014.
(35) L'une de ses conseillères en politique étrangère (Laura Rosenberger) indique que la candidate le soutiendra quand il répondra à trois considérations essentielles : la création de bons emplois aux États-Unis, l'augmentation des salaires et la contribution à la sécurité nationale des États-Unis.