Chacun le sent bien, nous vivons une rupture - tant en Europe qu'outre-Atlantique. Une rupture entre les establishments politiques et les électeurs. Une rupture entre ceux qui conçoivent la politique comme un « job », ou comme un jeu, et ceux qui, à l'inverse, aimeraient qu'elle soit une mission, voire un apostolat. Une rupture entre des professionnels de la chose publique, avant tout soucieux de durer, et des citoyens avant tout désireux de mieux vivre.
Bref, le temps où la virtuosité des dirigeants suffisait à les rendre populaires semble révolu. Ce Numéro d'été en apporte une preuve supplémentaire en braquant le projecteur sur deux personnages d'origine, de sensibilité et de génération fort différentes mais qui, l'un et l'autre, possèdent un don d'empathie et d'authenticité parfaitement en phase avec les attentes de leurs compatriotes :
- Marcelo Rebelo de Sousa, le nouveau Président du Portugal, élu au premier tour alors même que le contexte ne lui était pas favorable. Nous sommes flattés que M. de Sousa ait choisi Politique Internationale pour expliquer, dès le début de son mandat, ce que peut et doit être une politique « proche des gens ».
- Justin Trudeau, le tout récent Premier Ministre du Canada. Un homme qui, à 44 ans, redonne enthousiasme et foi en l'avenir à tout un peuple. Sur ce « Kennedy canadien » on lira, dans ces pages, un article fort éclairant.
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Ces tentatives de renouvellement de la gouvernance traditionnelle ne sauraient occulter, bien évidemment, les défis que sont, pour nos démocraties, les flux migratoires et le terrorisme. Qui mieux que le Ministre de l'Intérieur français, Bernard Cazeneuve, pouvait décrypter d'aussi brûlants dossiers et proposer des solutions audacieuses ? Nous lui avons proposé de lever un coin du voile...
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La campagne présidentielle américaine a, elle aussi, retenu notre attention. Héritage de Barack Obama ; influence exercée par la Cour suprême ; politique étrangère que conduirait Hillary Clinton ou Donald Trump selon que l'un ou l'autre occuperait le Bureau ovale ; prévisions « scientifiques » concernant l'issue du scrutin de novembre : on le voit, nous avons tenté de ne laisser dans l'ombre aucun des volets de cette compétition dont dépend, pour partie, le destin du monde libre.
Il reste qu'une élection est, aussi, un mystère qui ne saurait être mis en équations. Une simple phrase, parfois, peut dissoudre les hésitations et décider de la victoire. On se souvient peut-être, à cet égard, de la question élémentaire posée par Ronald Reagan aux Américains au cours d'un grand débat télévisé avec Jimmy Carter en 1980 : « Mes chers compatriotes, êtes-vous plus heureux qu'il y a quatre ans ? » Une question à la fois anodine et essentielle qui contribua à ouvrir les portes de la Maison-Blanche à M. Reagan et renvoya M. Carter, pourtant Président sortant, dans ses champs de cacahuètes de Géorgie...
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Cette riche livraison d'été nous entraîne également partout où l'actualité prend la forme d'un inquiétant point d'interrogation : de l'Ukraine à la Pologne, de la Bosnie au Kosovo, de la Turquie à l'Afghanistan, de l'Iran à l'Arabie saoudite, du Liban à la Syrie. Sans oublier le Brésil, confronté à un avenir plutôt sombre...
Pour ce qui concerne le Proche-Orient, nos lecteurs apprécieront tout spécialement, je pense, l'interview que nous a accordée Mohammed Dahlan, candidat au poste de Président de l'Autorité palestinienne. Un entretien dans lequel cet ancien proche de Yasser Arafat dénonce les dérives de Mahmoud Abbas - personnalisation du pouvoir, autoritarisme, malversations financières... - et expose les conditions d'une paix durable avec Israël.
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À ce numéro 152 nous avons ajouté un fort stimulant « Dossier spécial » consacré à l'électricité. Un dossier qui démontre en quoi la nécessité de lutter contre le réchauffement climatique et de réduire les émissions de gaz à effet de serre fait de l'électricité le véritable fer de lance de la transition énergétique, l'énergie reine du XXIe siècle.
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Voilà. Tout est dit. Les temps actuels, il est vrai, ne ressemblent guère à une mer tranquille. Mais il est vrai aussi, comme l'écrivait Edward Gibbon, que « les vents et les vagues sont toujours du côté des navigateurs habiles »...
À toutes et à tous : bonne lecture.r
Brigitte Adès & Patrick Wasjman
P.-S. : Politique Internationale n'a pas attendu le Brexit pour en évaluer les conséquences, tant pour le Royaume-Uni que pour l'Europe. Entre autres analyses, nos lecteurs pourront se reporter à l'article de Pauline Schnapper, « "Brexit", le pari risqué de David Cameron », paru dans notre numéro 150, hiver 2015-2016.