Les nuages s'amoncellent dangereusement dans le ciel des Balkans. Du Monténégro à la Macédoine, les foyers de crise se multiplient. Les solutions, partielles et provisoires, inspirées ou imposées par la communauté internationale pour mettre un terme aux conflits des années 1990 semblent avoir trouvé leurs limites, tant en Bosnie-Herzégovine qu'au Kosovo. La situation est d'autant plus instable que la région, comme souvent dans son histoire, se retrouve prise au piège de jeux géopolitiques qui la dépassent. Alors que la Russie, mais aussi la Turquie ne cessent de renforcer leur influence, l'élection de Donald Trump accroît l'incertitude : les États-Unis vont-ils changer d'orientation stratégique ou simplement poursuivre leur désengagement, amorcé depuis de longues années déjà ? Pour sa part, l'Union européenne, après avoir assumé des responsabilités sans cesse plus lourdes au cours de la dernière décennie, semble paralysée, incapable de reprendre l'initiative.
La ville de Mitrovica est le symbole de la division du Kosovo depuis la fin de la guerre, en juin 1999. Au nord de la rivière Ibar s'étendent les quartiers serbes, au sud la zone albanaise. Côté serbe, les accès au pont principal, épicentre symbolique des manifestations qui émaillent la vie de la cité depuis près de vingt ans, ne sont plus qu'un grand chantier : mi-décembre, les autorités serbes locales avaient érigé un mur de parpaing, finalement détruit début février suite à un accord arraché in extremis entre Belgrade et Pristina. La zone est toujours pavoisée de drapeaux serbes, mais les portraits du président russe Vladimir Poutine ont disparu, remplacés par ceux de... Donald Trump. « Nous espérons qu'un rapprochement entre la nouvelle administration américaine et la Russie permettra de trouver des solutions plus favorables aux Serbes du Kosovo », explique Igor Simic, conseiller municipal de la commune serbe de Mitrovica-Nord. Le jeune élu se reprend vite : « Ce sont peut-être des illusions, mais les gens croient au vieil adage selon lequel les ennemis de nos ennemis sont nos amis ; or, pour les Serbes du Kosovo, la famille Clinton symbolise les bombardements de 1999 et la proclamation d'indépendance. »
De fait, chacun tente d'interpréter les signes timides qui viennent de Washington, mais nul ne sait de quoi sera faite la politique américaine au sud-est de l'Europe. Pour Naim Rashiti, directeur d'un think tank de Pristina, « ni Bruxelles ni les Balkans ne seront une priorité de l'administration Trump. Cette dernière ne va donc certainement pas changer d'orientation stratégique dans la région et les nationalistes serbes, qui parient sur un rapprochement entre la Russie et les États-Unis, risquent fort d'en être pour leurs frais ». Une inquiétude sourde est cependant en train de se diffuser au sein de la société albanaise du Kosovo, qui a toujours pu compter sur les coups de pouce de l'allié américain. « Le retrait de Washington pourrait accélérer le retour de la Russie dans la région. Mais un relâchement de la tutelle internationale pourrait aussi être une chance pour le Kosovo si celui-ci parvenait enfin à prendre vraiment son destin en main …
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