Le quarante-cinquième président des États-Unis apparaît, sur le Moyen-Orient comme sur les autres dossiers de politique étrangère, à la fois déroutant, imprévisible et insaisissable. Il a martelé durant son discours d'investiture sa détermination à promouvoir « l'Amérique avant tout » (America first). Regrettant que les États-Unis « aient défendu les frontières d'autres nations en refusant de défendre les leurs », il s'est engagé à « respecter les anciennes alliances, à en forger de nouvelles et à réformer le monde pour éradiquer le terrorisme islamique de la surface de la planète ».
Le Moyen-Orient n'est ainsi évoqué dans ce discours fondateur que par le biais du « terrorisme islamique ». Les attentats du 11 septembre 2001 à New York et à Washington avaient amené George W. Bush à lancer une « guerre globale contre la terreur », elle-même prélude à l'invasion de l'Irak en mars 2003. Barack Obama s'était, au contraire, efforcé de dégager les États-Unis du bourbier moyen-oriental et de recentrer la lutte contre la seule Al-Qaïda. Ce qui l'avait incité, durant son second mandat, à longtemps minorer le danger inédit que représentait Daech (1) : il avait attendu la fin de l'été 2014 pour mobiliser une coalition internationale et s'était enferré dans le déni de la menace jihadiste sur le territoire américain, malgré des attentats répétés en 2015 et 2016 (2).
Trump, pour sa part, a prétendu joindre le geste à la parole en signant, dès le 27 janvier 2017, un décret présidentiel (executive order) au titre explicite : « Protéger la nation de l'entrée de terroristes étrangers aux États-Unis. » Les ressortissants de l'Iran, de l'Irak, de la Syrie, de la Libye, de la Somalie, du Soudan et du Yémen étaient désormais proscrits. Or aucun acte terroriste sur le sol américain n'a jamais été perpétré par un citoyen d'un de ces sept pays qui, en revanche, avaient en commun d'être arabes pour six d'entre eux et d'être tous très majoritairement musulmans - d'où l'appellation de « Muslim Ban » bientôt accolée à cette décision à effet immédiat. Après plusieurs jours de confusion et de protestation dans les aéroports, le décret était invalidé par un juge fédéral. La Maison-Blanche a revu sa copie, avec un nouveau décret signé le 6 mars, qui exclut l'Irak, mais a été de nouveau contesté par la justice fédérale dès son entrée en vigueur.
Cet épisode peu concluant est à l'image d'une administration Trump dont les déclarations fracassantes se heurtent souvent à un troublant amateurisme dans leur suivi. Les quelques semaines écoulées ne peuvent ainsi préjuger des orientations durables des États-Unis au Moyen-Orient. On rappellera que le concept même de Middle East a été forgé en 1902 par un stratège américain, l'amiral Alfred Mahan, pour désigner la région jusqu'alors appelée « Orient » ou « Levant ». L'intersection en ce « milieu » de la route maritime de Suez et de la route terrestre des Indes faisait du contrôle du « Moyen-Orient », aux yeux de Mahan, la clef de la puissance mondiale (3). …
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