Européen assumé, social-démocrate revendiqué, il pense que le prochain président de la Commission européenne en 2019 devrait être français. Nos partenaires, dit-il, ne sont pas hostiles à cette idée et il estime même à demi-mot qu'il pourrait faire l'affaire... Il est vrai qu'en bon énarque il coche toutes les cases ou presque : ministre délégué aux Affaires européennes dans le gouvernement Jospin, ministre de l'Économie et des Finances dans le gouvernement Ayrault, député européen durant six ans, il est depuis 2014 commissaire aux Affaires économiques et financières, à la Fiscalité et à l'Union douanière. Il connaît la machine communautaire sur le bout des doigts. Très proche de Jean-Claude Juncker, l'actuel président de la Commission, il participe à la plupart des réunions du G20, du FMI et de l'Eurogroupe - un « forum » dont il déplore l'opacité. Favorable à plus de transparence et de démocratie en Europe, il milite comme Emmanuel Macron pour une zone euro plus intégrée, salue l'« ADN européen » du président français, souligne le retour de la croissance, défend le « courage » d'Alexis Tsipras en Grèce et se dit convaincu que les négociations sur le Brexit ne viendront pas envahir l'agenda déjà bien fourni de l'Union européenne.
B. B.
Baudouin Bollaert - Comment jugez-vous le début des négociations sur le Brexit ?
Pierre Moscovici - Il y a d'abord eu le round d'observation : voir à qui l'on s'adresse, s'observer, se connaître. Cette phase était attendue ; elle ne pouvait déboucher sur rien de concret. Avant l'été, une deuxième phase a eu lieu, celle de la définition des positions. La position de la Commission européenne au nom des 27, et défendue par Michel Barnier au nom des 27, est claire : un Brexit ordonné, si possible amical avec dans l'avenir une relation proche. Car nous avons et aurons besoin de coopérer avec les Britanniques sur la sécurité, le commerce ou l'union douanière de façon pragmatique. Tout cet édifice repose néanmoins sur une donnée de départ incontournable : la situation du Royaume-Uni après le Brexit ne pourra pas être aussi favorable qu'avant. Choisir de sortir, c'est abandonner les privilèges du club.
B. B. - Où en est cette phase de définition des positions ?
P. M. - Elle est aujourd'hui terminée. Nous sommes entrés dans la troisième phase, celle de la vraie négociation, qui passe par une clarification. Et pour clarifier, il faut être deux. Mon sentiment est que les Européens savent vraiment où ils veulent aller. Ils ont un raisonnement séquentiel : solder le passé et résoudre des questions très concrètes. Parmi elles, la facture à payer par Londres : « les bons comptes font les bons amis » ; les droits des citoyens et de leurs familles - les Britanniques qui vivent dans l'UE et les Européens qui vivent en Grande-Bretagne ; sans oublier l'Irlande du Nord et ses relations avec la république d'Irlande - il ne faut pas réintroduire de frontières entre les deux parties. Nous travaillons sur tous ces sujets, sachant qu'avant …
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