Lorsque le premier numéro de la revue Politique Internationale est paru en 1978, l'Iran et Israël étaient les meilleurs alliés au Moyen-Orient. Quarante ans et une révolution islamique plus tard, ces deux États, qu'aucun différend territorial ou économique n'oppose, se considèrent comme des ennemis irréconciliables. Pourtant, ils ne se sont jamais formellement fait la guerre et les sociétés iranienne et israélienne se ressemblent à maints égards. Comment en est-on arrivé là en une génération ? Qui en tire profit ? Cette hostilité est-elle irréversible ? La realpolitik peut-elle reprendre ses droits ? On ne peut répondre à ces questions qu'en privilégiant le temps long de l'historien.
Une relation longtemps fondée sur l'histoire et la realpolitik
Dès l'Antiquité, la Perse et le royaume d'Israël se retrouvent liés par les aléas de l'Histoire, après que les empereurs persans eurent contraint le peuple juif à l'exil au VIIIe siècle avant Jésus-Christ. Pendant deux siècles - comme en témoignent les livres des Prophètes -, la communauté juive va prospérer en Perse, jusqu'à ce que Cyrus le Grand autorise le peuple juif à rentrer sur sa terre et à relever le temple de David vers 530 avant Jésus-Christ. Tous les juifs ne retourneront pas en Israël, certains préférant demeurer en Perse. De fait, une communauté juive Mizrahim est établie depuis plus de 2 700 ans dans les régions de Khorassan et de Téhéran. Elle constitue aujourd'hui la population juive la plus importante du Moyen-Orient, en dehors d'Israël. Estimée à 25 000 individus, elle est représentée statutairement par un député au Majles, le parlement iranien. Plusieurs personnalités israéliennes célèbres en sont issues : l'ancien président de l'État d'Israël, Moshé Katsav ; l'ancien chef d'état-major et ministre de la Défense, Shaul Mofaz ; ou bien encore la pop-star Kobi Shimoni. D'autres, originaires d'Europe de l'Est, ont côtoyé cette communauté en trouvant refuge en Iran pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils s'installeront ensuite en Israël où ils seront connus sous le nom d'« enfants de Téhéran », à l'instar d'Avigdor Ben Gal, l'un des héros israéliens de la guerre du Kippour.
Une alliance de revers à l'époque du chah (1948-1978)
Depuis son indépendance, proclamée en mai 1948, Israël a toujours entretenu d'excellentes relations avec l'Iran des Pahlavi, avec lequel il partageait une même volonté d'endiguement du camp arabe. Le chah fut le deuxième chef d'un État à majorité musulmane à reconnaître Israël, après la Turquie.
Dès la fin des années 1950, Israël envoie à Téhéran une délégation fournie qui fonctionne comme une véritable ambassade, en attendant l'accréditation formelle d'ambassadeurs qui interviendra plus tard. Les principaux responsables politiques israéliens se rendent en Iran et la plupart des chefs de l'armée impériale vont en Israël où ils analysent les victoires de Tsahal sur les armées arabes. Les pilotes iraniens de Phantom s'entraînent dans le Néguev pour parfaire leurs connaissances auprès d'as israéliens. En 1973, le chah mobilise son armée à la frontière irakienne pour faire pression sur Bagdad et limiter ainsi le volume du corps expéditionnaire irakien envoyé combattre Israël …
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