Chavkat Mirzioïev, président de l'Ouzbékistan depuis décembre 2016, ouvre cette ex-république soviétique tous azimuts, après vingt-cinq ans de dictature : convertibilité de la monnaie, fin du protectionnisme, virage à 180 degrés sur la politique religieuse, restauration de relations apaisées avec les pays voisins... Une sorte de perestroïka, entre désir de remettre le pays à sa main et constat que le système de son prédécesseur était au bord de l'implosion.
Le vent du changement
L'évolution que connaît actuellement la plus peuplée des cinq anciennes républiques soviétiques d'Asie centrale avec 32 millions d'âmes, où plus de 500 000 jeunes entrent chaque année sur un marché de l'emploi déprimé, est, en effet, spectaculaire.
En septembre 2016, le président Islam Karimov disparaissait à 78 ans après un quart de siècle d'un règne marqué par le sang, la répression, la fermeture, la stagnation économique. La nouvelle était annoncée quelques jours après le décès, le temps semble-t-il que les prétendants à la succession s'entendent, voire se neutralisent. Finalement, c'est celui qui avait été son premier ministre depuis 2003, Chavkat Mirzioïev, 61 ans, qui s'est imposé à la tête de l'État. Un homme du système donc, qui avait été en charge de l'économie - notamment du secteur clé de l'agriculture - et qui semble aujourd'hui vouloir prendre fermement le pays en main, en gestionnaire qu'il est.
Pour s'assurer le contrôle des principaux leviers de pouvoir, il lui a d'abord fallu écarter ses concurrents, autres potentiels successeurs ou faiseurs de roi. Au premier rang d'entre eux : Roustam Inoyatov, l'indéboulonnable patron du SNB (1), les services secrets ouzbeks qui étaient devenus au fil des ans un véritable État dans l'État, contrôlant des pans entiers de l'économie et maintenant le peuple sous leur férule, en particulier au prix d'une politique religieuse des plus répressives. Chavkat Mirzioïev a mis plus d'un an à limoger M. Inoyatov de son poste. C'est dire combien l'opération était délicate.
Mais, ce qui était moins attendu dans cette partie du monde où les régimes politiques conservent volontiers des airs de satrapie, de khanat ou de sultanat, M. Mirzioïev s'est lancé dans des réformes tous azimuts, aussi bien économiques que sociétales et, même, religieuses. Ces réformes de grande ampleur ont été formulées dans une « Stratégie de développement 2017-2021 » articulée en cinq « priorités » : 1) perfectionnement de la gouvernance ; 2) mise en oeuvre de l'État de droit et renforcement de la justice ; 3) développement économique et dérégulation ; 4) attention accrue portée à la sphère sociale ; et 5) amélioration de l'harmonie inter-ethnique et de la tolérance religieuse afin notamment de lutter contre le risque islamiste (2).
Des réformes audacieuses assurément, tant elles s'attaquent aux fondements du système instauré depuis vingt-cinq ans. Il restera à voir dans quelle mesure elles témoignent d'une vraie volonté de changer les choses. Ce qui est sûr, en tout cas, c'est que la politique du nouveau chef de l'État crée un formidable appel d'air dans la société ouzbèque. Celle-ci s'engouffre dans les espaces de liberté qui …
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