La promulgation par les autorités de Pékin, le 30 juin 2020, d’une Loi de la République populaire de Chine sur la sauvegarde de la sécurité nationale dans la région administrative spéciale de Hong Kong (LSN) sonne avant tout comme la rupture d’une promesse. Vingt-sept ans avant la fin de la période de 50 ans minimum sans changement garantie par Deng Xiaoping et par la Loi fondamentale (LF) définissant le système en vigueur après le 1er juillet 1997, le Parti communiste chinois (PCC) a mis un terme à la spécificité essentielle de la Région administrative spéciale (RAS) de Hong Kong : un système juridique et judiciaire entièrement différent et séparé de celui de la Chine continentale (1).
La fin d’un long miracle
Nous verrons en quoi la LSN a fondamentalement sapé ce système. Mais il importe de souligner qu’au-delà de la question du non-respect de la parole politique donnée cette promulgation marque la fin d’un long miracle : celui d’un minuscule territoire à l’extrémité méridionale du continent chinois qui, depuis 1842, a fonctionné, avec l’accord des autorités chinoises, selon des règles politiques et judiciaires spécifiques, tout en maintenant de façon presque continue des échanges importants avec son grand voisin (2).
Si l’on veut saisir le caractère historique de la LSN et de ses premiers effets visibles, il est indispensable de comprendre que, depuis près de 180 ans, Hong Kong a toujours constitué une exception improbable, un petit îlot de stabilité, de relative prospérité et surtout de liberté dans un océan marqué la plupart du temps par les troubles, la pauvreté et le despotisme.
Certes, Hong Kong a connu l’occupation japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. Certes, elle a souffert d’épidémies, d’incendies et de l’inégalité socio-politique inhérente aux colonies. Mais, dans l’ensemble, elle a été un refuge hautement apprécié (y compris par les communistes chinois quand ils étaient pourchassés par le Kuomintang) contre la misère et, surtout, contre les dictatures qui se sont succédé sur le continent chinois : celle de la dynastie mandchoue Qing, celle du Kuomintang puis celle du PCC. L’immense majorité de la population de Hong Kong est composée de Chinois qui ont choisi (eux-mêmes, leurs parents ou leurs ancêtres) d’habiter (de s’entasser) sur ce confetti de 1 000 kilomètres carrés plutôt que sur l’immense territoire de la mère patrie.
En dehors de la période de l’invasion japonaise, le moment le plus critique pour la survie de HK a été la prise de pouvoir par le PCC en 1949. Il est vrai que l’armée communiste n’a pas franchi la rivière Shenzhen lors de sa victorieuse descente vers le Sud ; le régime a néanmoins fermé la frontière (alors qu’elle avait été très poreuse) et fortement réduit les échanges qui sont devenus rapidement presque inexistants à cause de l’embargo international imposé à la Chine après le déclenchement de la guerre de Corée en 1950. Hong Kong perdait ainsi ce qui avait été sa raison d’être jusque-là. Mais le mal avait sécrété son propre remède : l’arrivée en masse des capitalistes shanghaiens fuyant le régime avec leurs capitaux et leur savoir-faire industriel, tandis que …
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