L’après-Merkel : une équation à plusieurs inconnues

n° 169 - Automne 2020

Il y a un an, fin 2019, de grands doutes planaient sur la capacité d’Angela Merkel à terminer son quatrième mandat, prévu à la fin de l’année 2021 (1). Sa « grande coalition » donnait des signes inquiétants d’essoufflement. Le Parti social-démocrate (SPD) menaçait de quitter le gouvernement. À la tête d’une majorité devenue particulièrement instable, Angela Merkel faisait alors figure de chancelière en sursis.

Un an plus tard, le contexte a radicalement changé. Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, qui a jusqu’à présent davantage épargné l’Allemagne que la plupart de ses voisins, Angela Merkel a restauré son leadership. Les enquêtes d’opinion en témoignent. Entre février et septembre 2020, sa cote de popularité personnelle est passée de 53 % à 72 %. Sur la même période, la part des électeurs se disant satisfaits de l’action de son gouvernement a bondi de 32 % à 66 % (2). Ce qui est vrai en politique intérieure l’est également sur la scène internationale. Selon une étude réalisée à l’été 2020 dans treize pays (3), Angela Merkel est la dirigeante qui inspire aujourd’hui le plus confiance (76 %), devant Emmanuel Macron (64 %), Boris Johnson (48 %), Vladimir Poutine (23 %), Xi Jinping (19 %) et Donald Trump (16 %).

Forte de cette autorité retrouvée à la faveur de l’épidémie de coronavirus, la chancelière allemande est désormais quasiment assurée de rester au pouvoir jusqu’au terme de son quatrième mandat. Mais à un an de l’échéance, le scénario de sa succession paraît plus ouvert que jamais. Depuis que sa « dauphine » désignée, Annegret Kramp-Karrenbauer (« AKK »), a annoncé à la surprise générale, le 10 février 2020, qu’elle ne serait pas candidate à la chancellerie, la droite allemande doit se trouver en urgence un nouveau leader susceptible d’incarner la relève d’une Angela Merkel au faîte de sa popularité. Or, si les prétendants ne manquent pas, aucun n’est parvenu pour l’instant à s’imposer avec évidence.

Armin Laschet, Friedrich Merz, Norbert Röttgen : trois candidats à la conquête de la CDU 

En se retirant de la course à la chancellerie, Annegret Kramp-Karrenbauer a également remis en jeu son mandat de présidente de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) qu’elle occupait depuis le 7 décembre 2018. Dans les jours qui ont suivi l’annonce de son départ, trois candidats se sont déclarés pour lui succéder à la tête du parti : Armin Laschet, le ministre-président de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le Land le plus peuplé d’Allemagne ; l’ancien député Friedrich Merz, reconverti dans les affaires depuis une dizaine d’années ; et Norbert Röttgen, le président de la commission des affaires étrangères du Bundestag. 

À l’origine, l’un des trois aurait dû être élu à la tête du parti lors d’un congrès extraordinaire initialement fixé au 25 avril 2020. Mais l’irruption du Covid-19 a bouleversé ce calendrier. Finalement, le nom du vainqueur ne sera connu qu’au début du mois de décembre. Or, pour ceux qui apparaissaient au départ comme les deux favoris, Armin Laschet et Friedrich Merz, cette campagne plus longue aura singulièrement compliqué la donne.

Armin Laschet : la carte de la continuité

Au sein de la CDU, Armin Laschet incarne une ligne résolument centriste. C’est le cas sur l’Europe, où ce natif d’Aix-la-Chapelle fut l’un des rares, au …