En juin dernier, la célébration du 70e anniversaire de la guerre de Corée (1950-1953) n’a suscité qu’un intérêt d’estime. Cela peut se comprendre, tant l’opinion internationale est polarisée par l’actualité sanitaire. Il s’agit d’un conflit ancien qu’on a pris l’habitude de considérer comme une « guerre oubliée » (1). Et puis, surtout, l’affaire n’est pas close. C’est un armistice, signé le 27 juillet 1953 dans le hameau de Panmunjeom, par les Nations unies, la Corée du Nord et la Chine, qui a mis fin aux hostilités. Mais comme aucun traité de paix n’est jamais venu clore le processus, les deux Corées sont techniquement toujours en guerre. Et, de fait, c’est une interminable guerre froide qui les oppose depuis sept décennies, réduisant chaque fois à néant les espoirs de dialogue et les pourparlers de paix.
Le printemps 2019 en a administré une nouvelle fois la preuve puisque après les trois rencontres au sommet de l’année 2018, qui avaient laissé entrevoir une sortie du tunnel (2), les incidents frontaliers ont repris comme par le passé. Le 3 mai 2020, des soldats du Nord ont ouvert le feu sur leurs collègues du Sud qui ont aussitôt répliqué. Et le 16 juin, quelques jours avant le 70e anniversaire de la guerre de Corée, les autorités de Pyongyang ont décidé de dynamiter le bureau de liaison intercoréen implanté au mois de septembre précédent dans la zone spéciale de Kaesong et qu’on avait pris, visiblement trop vite, pour un embryon d’ambassade. En d’autres termes, rien n’a changé depuis 1953. Il y a toujours deux Corées, elles restent à couteaux tirés et les perspectives de rapprochement sont, une fois encore, reportées sine die. Quant à la réunification de la péninsule, elle s’apparente de plus en plus à un vœu pieux.
Cette analyse n’est pas fausse. Sur la pile des dossiers internationaux que ni la force militaire, ni la négociation diplomatique, ni même la patine du temps ne sont parvenues à résoudre, la Corée figure certainement en bonne place. Rien ne sert, pour autant, de céder au fatalisme. Les effets demeurent, sans doute, mais les causes changent. Se polariser sur les crises à répétition, les volte-face et les palinodies revient à privilégier le temps court. Alors que le long terme, lui, nous offre une autre perspective. Il nous laisse entrevoir qu’il n’y a plus d’alternative au rapprochement intercoréen et même, paradoxalement, que la réunification de la péninsule pourrait bien avoir déjà commencé.
Aux origines de la partition
Les origines de la partition de la Corée sont connues. Elles remontent à la guerre froide. En août 1945, résolues à se partager les dépouilles de l’empire japonais, États-Unis et URSS se sont cyniquement partagé la péninsule coréenne en imposant chacun son État fantoche de part et d’autre du 38e parallèle. Et depuis, la situation s’est figée. Ultracapitaliste et ultralibérale, la république du Sud demeure un allié indéfectible des États-Unis auxquels la lient une série de traités militaires et commerciaux. Tandis que la république démocratique et populaire de Pyongyang, avec son parti du Travail, ses uniformes staliniens et son économie étatisée …
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