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Haut-Karabagh : radioscopie du conflit

Politique Internationale Une question toute simple pour commencer : qui a déclenché la guerre au Haut-Karabagh ?

Edward Nalbandian (1) — La réponse ne fait aucun doute. Qu’il s’agisse de la première guerre de 1992-1994, de l’agression militaire d’avril 2016 ou de la nouvelle guerre de septembre-novembre 2020, toutes ont été déclenchées par l’Azerbaïdjan. Aussi bien pendant la première que la dernière guerre, Bakou a employé des mercenaires liés à des organisations terroristes notoires — ce qui a été confirmé par de hauts responsables à Moscou, Paris, Washington et dans d’autres capitales ainsi que par diverses organisations internationales. On sait que, lors des deux premières agressions, Bakou a bénéficié du soutien moral et militaire d’Ankara. On pourrait alors affirmer sans exagération aucune que l’initiateur de la nouvelle guerre aux côtés de l’Azerbaïdjan était la Turquie, qui a d’ailleurs été directement impliquée dans les opérations militaires. Cette guerre à grande échelle, où tous types d’armements ont été utilisés, a constitué une violation flagrante des accords de cessez-le-feu de 1994-1995 conclus, pour une durée indéterminée, entre l’Azerbaïdjan, le Haut-Karabagh et l’Arménie. En particulier de l’un des principes fondamentaux mis en avant par les coprésidents du groupe de Minsk de l’OSCE, celui du non-recours à la force. Pendant des années, ce principe a figuré pratiquement dans tous les documents relatifs au Haut-Karabagh adoptés au niveau des chefs d’État, des ministres des Affaires étrangères et des ambassadeurs des pays coprésidents du groupe de Minsk. La guerre a été déclenchée au mépris de l’appel du secrétaire général de l’ONU du 23 mars 2020, soutenu par 170 États, à un cessez-le-feu global dans le contexte de la pandémie, et en violation de la résolution n° 2532 du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée à l’unanimité le 1er juillet 2020.

 

Cette guerre a été non seulement une agression contre l’Artsakh (le Haut-Karabagh) et le peuple arménien, mais aussi un défi lancé par l’Azerbaïdjan et la Turquie aux pays coprésidents du groupe de Minsk — la Russie, les États-Unis et la France — ainsi qu’à l’ensemble de la communauté internationale.

Mais la question — qui a déclenché la nouvelle guerre ? — est extrêmement importante car elle pose également celle de la responsabilité des milliers de tués, de blessés, de disparus et de destins brisés, des destructions effroyables, des graves atteintes au droit humanitaire. On ne doit pas fermer les yeux sur ces horreurs, surtout quand ceux qui les ont commises se pavanent publiquement.

« La guerre est un crime que n’excuse pas la victoire », disait Voltaire.

P. I. Les coprésidents ont fait beaucoup d’efforts pour empêcher l’escalade. Pourquoi ça n’a pas marché ?

E. N. — Pour une raison très simple. L’Azerbaïdjan, contrairement à l’Arménie, a rejeté les propositions des coprésidents du groupe de Minsk relatives à la réaffirmation des engagements sur un règlement exclusivement pacifique du conflit. Les coprésidents ont plus d’une fois proposé de renforcer les moyens du bureau du représentant personnel du président en exercice de l’OSCE pour la surveillance du respect du régime de cessez-le-feu. …