A Téhéran, la transition a commencé. Certes, un long chemin reste à parcourir. Tant que la loi islamique prévaudra sur la Constitution et que l'influence du clergé traditionnel au sein de l'Etat restera aussi pesante, on pourra difficilement parler de démocratisation. A la veille des élections législatives de février 2000, les tensions s'exacerbent au point que le pouvoir a parfois du mal à éviter tout débordement. Reste que, si les réformateurs l'emportent, une étape importante sera franchie. L'hypothèse est loin d'être improbable car, en dépit des apparences, l'affaiblissement des conservateurs islamiques est irréversible. De nouveaux acteurs sont apparus sur la scène politique qui cherchent à transformer la nature de l'Etat islamique et jouent, à cet égard, un rôle déterminant dans les évolutions en cours: la jeunesse urbaine, les femmes, les réformateurs musulmans, les opposants et les intellectuels laïcs. En Iran, l'avenir de la démocratie ne dépend pas exclusivement des jeux de factions internes au régime islamique. Il réside en grande partie entre les mains d'une société civile dont la vitalité constitue la principale richesse.
Le déclin annoncé des conservateurs
Depuis le choc de l'élection de Mohammad Khatami, le 23 mai 1997, l'avenir politique du clergé conservateur s'est considérablement assombri. L'avertissement des électeurs est clair: ils entendent tourner la page de l'arbitraire religieux. L'automne des théocrates coïncide avec une profonde mutation de la société pour laquelle l'exigence du respect des droits de l'individu ne peut plus être l'affaire exclusive des cercles intellectuels ou des élites éclairées. Pour l'homme de la rue, le respect des droits de l'homme est l'aune à laquelle tout doit désormais être mesuré. L'esprit de civilité, l'aspiration à des changements pacifiques gagnent du terrain, au détriment des idéologies révolutionnaires, qu'elles soient de type islamiste ou non (1) . Confrontés à cette nouvelle réalité, les conservateurs (mobilisés autour du Guide suprême, Ali Khamenei, dont la légitimité est plus que jamais contestée) ont compris que le processus actuel vise à les effacer progressivement de la scène politique. D'une certaine manière, l'arrivée de Khatami au pouvoir leur a offert la chance d'échapper à un destin tragique, semblable à celui que les tribunaux de la révolution islamique ont réservé à certains partisans de l'ancien régime. Reste à savoir s'ils sauront saisir cette chance et renoncer à leur monopole politique afin de conserver une partie de leur pouvoir et de leurs privilèges.
Les purs et durs
En apparence, le bloc constitué du clergé traditionnel et de ses alliés conservateurs ne paraît pas ébranlé. Certains, plus lucides que d'autres, sont cependant conscients de la menace qui plane sur eux et des dégâts irréparables qu'elle pourrait entraîner. C'est, par exemple, le cas de l'ayatollah Mahdavi-Kani, président de «l'Association du clergé combattant» (2) , qui regroupe les éléments les plus orthodoxes du régime islamique. Depuis l'élection de Khatami, il a plusieurs fois appelé ses pairs à éviter le recours systématique à la violence et à affronter leurs adversaires sur le seul terrain politique. C'est pour mener ce combat qu'il a contribué au lancement du journal Entékhâb …
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