Christoph Keller - Dans un rapport publié par le Conseil de l'Europe, au début de l'année 2000, on vous présente comme le porte-parole d'un mouvement extrémiste de droite, semblable à celui de Jörg Haider en Autriche. Quelle a été votre réaction à la lecture de ce texte ?
Christoph Blocher - Le fait que l'on me classe à l'extrême droite en dit plus sur la qualité de ce rapport que sur mon positionnement idéologique ! A moins qu'il ne s'agisse d'une vengeance politique ourdie par certains parlementaires socialistes membres du Conseil de l'Europe. S'il a été rédigé de bonne foi, ce texte est la preuve qu'à Strasbourg on ne connaît rien de la situation politique dans mon pays. Pour les lecteurs de votre revue, je tiens à tirer les choses au clair : je ne suis pas un représentant de l'extrême droite. Les extrémistes de droite sont des gens qui cherchent à renverser le système démocratique dans leur pays ; tandis que moi, je suis un démocrate pur et dur - j'aurais même envie de dire un « démocrate extrême » ! Je suis un partisan fervent de la démocratie directe telle qu'elle se pratique en Suisse. Et j'ajoute que je ne suis pas non plus un nationaliste, mais un patriote.
C.K. - Où est la différence ?
C.B. - La différence est très nette dans mon esprit. Les nationalistes cherchent à prouver la supériorité de leur nation sur les autres ; et ils le font souvent avec beaucoup d'arrogance. Ce n'est pas mon cas. Je crois simplement que la Suisse est un Sonderfall, autrement dit un « cas particulier ». Et, en même temps, je suis convaincu que chaque nation est, d'une certaine manière, un cas particulier. Au fond, ce qui me distingue de toute tendance extrémiste, c'est que je ne suis pas xénophobe.
C.K. - Vos propos ne manqueront pas d'étonner tous ceux qui gardent en mémoire la campagne d'affichage très agressive lancée par l'UDC au moment du référendum sur le droit d'asile en Suisse : on y voyait un homme moustachu et basané en train de déchirer un drapeau suisse ...
C.B. - Ce moustachu avec ses lunettes de soleil représentait un criminel. J'ai toujours considéré que, pour conduire une politique efficace, il faut être cohérent et ne pas avoir peur d'adopter un style direct. Si la campagne en question a aidé mes compatriotes à prendre conscience d'un problème, c'est qu'elle a rempli son rôle. D'autant que, en l'occurrence, le problème n'est pas mince puisqu'il s'agit de l'immigration. De plus en plus de gens abusent de notre droit d'asile pour faire une carrière criminelle en Suisse. Il est temps d'en tirer les conséquences. Tout ce que nous demandons c'est, d'une part, que les lois existantes soient appliquées au pied de la lettre et, d'autre part, que le dispositif actuel soit renforcé avec le soutien du peuple.
C.K. - La politique d'exclusion des étrangers que vous professez ne diffère en rien de celle prônée par Jörg Haider en …
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