Les Grands de ce monde s'expriment dans

LA HONGRIE QUI GAGNE

L'Etat hongrois célèbre, en cette année 2000, le millénaire de sa création. La couronne de Saint Etienne, fondateur du royaume de Hongrie, trône dans le hall central du Parlement de Budapest. Un premier ministre de trente-sept ans est à l'origine de l'exposition de ce symbole sous les ors néo-gothiques d'une République hongroise qui accumule les succès : une démocratisation réussie ; un Etat de droit solide et intégré à l'Otan depuis mars 1999 ; une croissance économique dont la vigueur, en dépit de la faillite russe et de la guerre en Yougoslavie, a surpris la plupart des experts et un taux de chômage n'excédant pas 6,7 % et qui continue de baisser. Il y a fort à parier qu'avec un tel tableau d'honneur, la Hongrie sera à la première place, parmi les ex-pays de l'Est, à intégrer l'Union européenne.

Elu premier ministre en 1998, Viktor Orban semble symboliser cette Hongrie qui gagne. Certes, la réussite actuelle découle, en grande partie, des efforts accomplis par le précédent gouvernement socialiste, notamment en matière de réduction des dépenses publiques. Il n'empêche : après des années d'austérité, la croissance est au rendez-vous quand l'opposition conservatrice, sous la houlette de Viktor Orban, arrive au pouvoir.

En quelques années, le jeune étudiant en droit qui haranguait courageusement la foule au mois de décembre 1988 a su se donner une vraie carrure politique en imposant un style offensif et direct. D'aucuns diront « populiste ». Son parti, le Fidesz, est devenu un authentique parti de gouvernement, avec un programme conservateur centré sur l'abolition des privilèges de la nomenklatura, la lutte contre la corruption, la défense de la petite bourgeoisie provinciale contre l'élite de Budapest, et la restauration des valeurs chrétiennes.

Peu avant le scrutin, le Fidesz fait alliance avec les rescapés du Forum démocratique hongrois — le parti de Jozsef Antall, chef historique du centre droit, décédé en décembre 1993. Mais, pour gouverner, il est contraint d'élargir la coalition au parti agrarien des Petits propriétaires dont le leader, Jozsef Torgyan, obtient le portefeuille de l'Agriculture. Ce partenaire imprévisible vaut au gouvernement ses premiers ennuis. En 1999, Jozsef Torgyan va jusqu'à oublier d'utiliser les subventions du programme Phare de Bruxelles, destiné aux ex-pays communistes. Plusieurs millions d'euros correspondant à de nouvelles subventions sont ainsi perdus.

Mais peu importe : rien n'arrête Viktor Orban ! Il renforce les prérogatives de son cabinet et se bat sur tous les fronts grâce à une Constitution qui lui donne l'essentiel du pouvoir. Adoptant une rhétorique rooseveltienne, il lance, au début de l'année 2000, le programme Szecheny. Ce New Deal à la hongroise repose sur d'importants investissements dans les secteurs du transport et du logement, sur la promotion des PME, sur le rééquilibrage du développement entre les régions, et sur l'implantation des grandes firmes internationales qui ont favorisé la croissance de l'économie. Sur les questions de politique extérieure, et notamment sur le problème posé par l'ascension du FPÖ en Autriche, Viktor Orban revendique une ligne de conduite indépendante de Bruxelles. Nul doute qu'avec Viktor Orban, la Hongrie saura se faire entendre dans l'Europe de demain ...