Outre la géographie qui les rapproche d'un point de vue physique, l'Afrique du Sud, le Zimbabwe et la Namibie présentent bien des similitudes. Les trois pays ont connu l'apartheid et restent marqués par les stigmates de cette idéologie surannée ; tous ont vu leur majorité noire s'emparer du pouvoir politique à la faveur des premières élections multiraciales organisées selon le principe « un homme, une voix » ; tous ont hérité d'une économie reposant largement sur une minorité blanche que son haut niveau de qualification et ses compétences rendent très mobile ; tous, enfin, se sont engagés dans un programme controversé de rattrapage social en faveur de la majorité noire.
Or la communauté blanche d'Afrique australe voit sa domination économique remise en cause par les populations noires autochtones, avec parfois la bénédiction des pouvoirs politiques en place. A des degrés divers selon les pays, ce conflit des possédants et des démunis est alimenté par des griefs et des ressentiments comparables. Il s'exprime par les mêmes violences et les mêmes intimidations, physiques ou politiques.
A l'origine de cette situation, il y a, certes, un passé colonial qui ne passe pas, mais également une situation économique défavorable, un environnement politique délétère et les nombreuses illusions nées de la prise en main du pouvoir politique par des majorités noires plus ou moins bien préparées à gouverner. S'y ajoute un jeu d'intérêts claniques et ethniques croisés qui tend à prendre le pas sur les alliances politiques traditionnelles. Ce climat d'affrontements intercommunautaires pose la question - si souvent escamotée - du devenir des Blancs dans un sous-continent en perpétuelle ébullition politique.
L'enjeu foncier
La question foncière, centrale dans les sociétés post-apartheid sud-africaine, namibienne et zimbabwéenne, continuera sans doute longtemps d'empoisonner les relations entre Noirs et Blancs tant la répartition des terres demeure inégale entre les deux communautés. Au Zimbabwe, les fermiers blancs détiennent toujours 4 000 exploitations et 70 % des terres les plus fertiles, sur lesquelles travaillent 350 000 ouvriers agricoles. Un million de fermiers noirs doivent, quant à eux, se contenter des 30 % restants. En Namibie, la répartition raciale des terres est sensiblement la même puisque quelque 3 700 exploitants blancs, auxquels s'ajoute une poignée de deux à trois cents prébendiers noirs, monopolisent 71 % des terres cultivables. En Afrique du Sud, enfin, le programme de restitution des terres lancé en 1994 manque de moyens financiers. Si bien que les fermiers blancs possèdent encore plus de 60 % des surfaces cultivables, dans un pays où les terres fertiles sont denrée rare. Les Noirs ne veulent plus s'accommoder de cette situation.
Le dérapage de Mugabe
Lorsque la Rhodésie accède à l'indépendance en 1980, 5 000 fermiers blancs détiennent toujours la moitié des terres cultivables affectées aux cultures d'exportation. Au même moment, les terres communales des 174 Tribal Trust Lands ne parviennent pas à nourrir une population en expansion rapide. La conférence de Lancaster House (1) posera néanmoins le principe de non-spoliation, et la Grande-Bretagne s'engage alors à financer un vaste projet de rachat …
Ce site est en accès libre. Pour lire la suite, il vous suffit de vous inscrire.
J'ai déjà un compte
M'inscrire
Celui-ci sera votre espace privilégié où vous pourrez consulter à tout moment :
- Historiques de commandes
- Liens vers les revues, articles ou entretiens achetés
- Informations personnelles