Galia Ackerman - Monsieur le Ministre, en août 1998, la Russie a été confrontée à une grave crise financière. Les conséquences de cette crise ont-elles été surmontées ?
Guerman Gref - Pas totalement, et il faudra encore quelques années avant de rétablir la situation. Les revenus de la population se redressent progressivement et se situent actuellement à 75 % du niveau du début de l'année 1998. Le volume des transactions sur le marché des titres, lui, est toujours en berne. Quant au secteur bancaire, il a également du mal à remonter la pente. Naturellement, ce défaut de paiement a porté un coup très dur à notre réputation et à notre image. Nous en pâtissons encore. Mais notre économie repose désormais sur des bases beaucoup plus saines. Pour la première fois depuis dix ans, nous enregistrons une croissance régulière et soutenue. L'an dernier, elle a même atteint un rythme sans précédent : 7,7 % pour le PIB et 9,2 % pour la production industrielle. Bien qu'il soit difficile d'établir des comparaisons avec l'époque communiste, il ressort de nos calculs que l'économie n'a pas connu une croissance pareille depuis trente ans. C'était juste après les réformes de Kossyguine (1).
G. A. - Outre les prix élevés du pétrole et de certains métaux, quels sont les principaux facteurs qui ont contribué à cette croissance exceptionnelle ?
G. G.- Contrairement à ce que vous pensez, les prix élevés de l'énergie n'ont pas joué un rôle crucial. L'incidence de la hausse du pétrole sur la croissance a même été très modeste. En fait, l'élément décisif a été la dévaluation du rouble. Les marchandises russes sont devenues compétitives, et une partie des importations a été remplacée par la production locale. Le deuxième facteur, c'est le changement de mentalité observé chez les entrepreneurs et les nouvelles règles de fonctionnement du monde des affaires. Car, en soi, la dévaluation n'aurait pas suffi à relancer la croissance : par deux fois au cours de la dernière décennie, nous nous sommes retrouvés dans une conjoncture monétaire comparable et, pourtant, la croissance n'a pas été au rendez-vous. La spécificité de la situation actuelle, c'est que ces facteurs-là se sont superposés à une mutation structurelle et, surtout, à une évolution psychologique des agents économiques. Finalement, il aura fallu dix ans pour que le mode de gestion soviétique soit abandonné et pour que les plus doués apprennent à travailler dans un environnement différent. Les chefs d'entreprise ont fini par assimiler les règles de l'économie monétaire : depuis deux ans, une véritable révolution est en marche. Pour la première fois, grâce à la persévérance du gouvernement, le système de troc a été presque entièrement éliminé. Je vois enfin un troisième facteur qui explique la bonne santé actuelle de l'économie russe : le climat de stabilité macroéconomique et politique qu'a su créer le gouvernement. Après les dernières élections, plusieurs réformes de grande ampleur ont vu le jour, en particulier l'aménagement du Code fiscal et d'un nouveau Code douanier. Allègement de la pression fiscale, simplification et …
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