Un homme bien, dans un mauvais système, en des temps difficiles : tel est le souvenir que l'histoire pourrait garder du Hojjat al-Islam wa-al-Moslemeen Sayyed Muhammad Khatami Yazdi (1), l'homme qui vient d'être réélu président de la République islamique d'Iran pour un deuxième et dernier mandat de quatre ans, en dépit d'un bilan très controversé.
Les métamorphoses d'un mollah
Etiqueté « réformiste » avant même d'avoir conquis la présidence avec une majorité des deux tiers des suffrages, en mai 1997, Khatami est demeuré une énigme pour nombre de commentateurs de la vie politique iranienne. Certains analystes, en particulier à l'Ouest, ont cru voir en lui un démocrate à l'européenne, coiffé d'un turban. Et une bonne partie des médias étrangers leur ont emboîté le pas, contribuant à forger le cliché d'un Khatami polyglotte et doté d'une solide expérience du monde occidental. Or la seule langue que le président maîtrise à peu près, en dehors du persan, est l'arabe. Quant à son expérience occidentale, elle se limite à un séjour de huit mois, en 1980, à Hambourg, où il a dirigé une mosquée chiite. Et, pourtant, cette image flatteuse a, plus que tout autre facteur, influé sur la nouvelle politique de l'Union européenne vis-à-vis de l'Iran.
Au-delà des citations empruntées à des autorités intellectuelles aussi inattendues que Hegel, Feuerbach ou Nietzsche, dont les speech-writers se plaisent à saupoudrer ses discours, rien ne permet d'affirmer, comme l'a fait CNN, que le président Khatami soit un parfait connaisseur de la philosophie occidentale. D'ailleurs, à y regarder de près, il y a bien d'autres détails de cette image d'épinal qui ne résistent pas à un examen critique. Pour commencer, Khatami n'a jamais été formé à la fonction de mollah et l'université d'Ispahan dont il est sorti diplômé ne dispense pas d'enseignement théologique. Dans sa biographie officielle, parue en juin 2001 à la veille du scrutin, il se contente de dire qu'il a étudié la théologie chiite « jusqu'à un certain niveau ». Avant l'arrivée au pouvoir des mollahs, en 1979, il était rare de voir Khatami revêtir l'uniforme religieux et coiffer le turban noir des sayyeds qui symbolise la filiation de l'ecclésiastique avec le prophète Mahomet. A l'époque, le futur président arborait plus volontiers des costumes coupés à l'occidentale et portait souvent un noeud papillon.
Du « Nord-Coréen » de l'islam...
Khatami ne fut pas non plus ce « champion de la libéralisation » vanté par Joschka Fischer. La première fois que le nom de Khatami retint l'attention du public à Téhéran, c'était en août 1979, lorsqu'un groupe de fondamentalistes en armes, dont il faisait partie, tenta de détourner un appareil d'Iran Air vers Tripoli. But de l'opération : assister aux festivités organisées pour le 10e anniversaire de l'arrivée au pouvoir du colonel Kadhafi en 1969 ! Les pirates de l'air étaient dirigés par un jeune mollah appelé Muhamad Montazeri - alias « Ayatollah Ringo » - qui, plus tard, fut assassiné par des terroristes non identifiés. Khatami se fit remarquer en facilitant la prise …
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