Les Grands de ce monde s'expriment dans

CUBA: UNE TRANSITION EN TROMPE L'OEIL

Le brutal évanouissement en public (et en direct devant les caméras de la télévision cubaine) du Lider Maximo, survenu près de La Havane le 23 juin, a brusquement posé, en termes non plus virtuels mais réels, la question de l'inévitable transition. Les Cubains l'ont vu s'écrouler à la tribune après des balbutiements incompréhensibles, avant d'être rapidement évacué à l'arrière par ses services de sécurité qui ont d'abord cru à un attentat : d'une petite mallette noire a surgi un impressionnant bouclier pare-balles destiné à protéger le Chef en toutes circonstances, sauf contre la maladie et le temps. Il fallait voir les réactions dans la foule ! Des jeunes filles portant leurs mains à leur visage, comme si l'inéluctable était néanmoins inconcevable : Fidel incapable d'achever l'un de ses interminables discours en plein soleil, ce fut un peu comme l'acteur qui perd le fil de son texte au milieu de la représentation.
Les technocrates et le petit frère
C'est à présent au tour des autres, longtemps relégués dans l'ombre de leur mentor, de se montrer en public. Qui sont-ils ? Le premier dans l'ordre d'apparition sur scène n'est pas le successeur désigné. Il s'agit de Felipe Pérez Roque, le jeune ministre des Affaires étrangères, sorti récemment des coulisses (il était auparavant secrétaire personnel de Fidel Castro) pour occuper l'un des tout premiers rôles. Un rôle beaucoup trop grand pour lui mais qu'il se sent, d'ores et déjà, prêt à assumer. Pérez Roque a, en effet, le premier, bondi sur la tribune pour assurer à la foule que le pouvoir n'était pas vacant ...
Depuis longtemps considéré par les milieux d'affaires internationaux et par la presse comme l'un des jeunes loups les plus prometteurs, Carlos Lage, l'actuel ministre de l'Economie, lui aussi assis au premier rang, est resté sagement en retrait lors du dramatique incident survenu à son Chef. Il sait par expérience que se dévoiler trop tôt pourrait lui coûter et son poste et sa carrière. Sans doute n'a-t-il aucune envie de connaître le sort de l'ancien idéologue du Parti, Carlos Aldana, confiné pendant de longues années à la tête d'un obscur plan de production dans une tout aussi obscure province à l'intérieur de l'île. Cette mésaventure est arrivée, plus récemment, au bouillant et brouillon ministre des Affaires étrangères, Roberto Robaina, écarté du pouvoir parce que trop voyant, trop branché, trop «jeuniste».
Beaucoup plus ancien parmi les candidats civils au pouvoir, Ricardo Alarcon, l'actuel président du Parlement croupion pompeusement dénommé « Assemblée nationale du pouvoir populaire », est un vieux compagnon du Lider. C'est l'un de ces diplomates formés sous l'ancien régime (celui de Batista), capables de défendre à la fois le Diable et le bon Dieu devant n'importe quelle instance internationale, justifiant aussi bien la politique de Cuba devant la Commission pour les droits de l'homme de l'Union européenne que négociant à Washington le rapatriement des balseros durant la crise de 1994 (1). Longtemps considéré comme un aperturista, un homme capable d'esprit d'ouverture, il a vu son étoile pâlir à …