Le 11 septembre 2001, les deux tours jumelles du World Trade Center s'écroulèrent dans un fracas d'épouvante. Mais c'est aussi l'accumulation d'un demi-siècle de tensions régionales à l'autre extrémité de la planète qui, ce jour-là, explosa au coeur de Manhattan. Cette tragédie a éclaboussé le bonheur du monde, non seulement à cause de l'apocalyptique lubie d'une secte fanatique, mais encore, et surtout, par suite de l'inertie suffisante et aveugle des habituels « observateurs » en place. Six mille personnes de toutes nationalités sont mortes brûlées vives du simple refus obstiné d'y voir clair de la part des plus hautes autorités diplomatiques des trois plus influentes chancelleries du monde occidental : Washington, Londres et Paris. Rarement realpolitik aura été plus irréaliste, au point que le désastre du World Trade Center fait évoquer les archétypes : Munich, Yalta ...
Le tremblement de terre de septembre 2001 est à la fois mondial et islamique, politique et culturel, international et afghano-pakistanais. Son épicentre reste Kaboul. Deux lignes sismiques s'y sont croisées pour se renforcer et se propager à l'échelle planétaire :
1° ) d'abord, l'ambition territoriale effrénée, mais rigoureusement et très froidement stratégique, d'une dangereuse dictature militaire : la « stratocratie » pakistanaise, ennemie de l'Inde, et aujourd'hui pourvue de l'arme nucléaire ;
2° ) ensuite, l'idéologie extrémiste internationaliste du mouvement dit de l'« islamisme » radical, cristallisé (pour l'instant) autour de la figure d'Ousâma ben Lâden. C'est la volonté obstinée de l'état-major pakistanais de s'allier à l'islamisme international pour assurer sa domination locale sur l'entité afghane voisine qui a, en dernier lieu, et de l'autre côté de l'Atlantique, déclenché le massacre de New York.
Colmater ces deux failles - l'afghano-pakistanaise locale, et l'islamiste mondiale - pour ramener un calme durable dans cette partie du globe, et par là assurer la paix du reste de la planète, requerra une diplomatie lucide, tenace et saine. Telle politique internationale clairvoyante, à en juger par les erreurs accumulées au cours des cinquante-quatre dernières années, n'est pas garantie. Il faudra l'exiger.
Or il n'y a pas de clairvoyance sans profondeur. Et la profondeur ne s'atteint pas sans analyse rigoureuse, même difficile. Cette analyse implique l'examen de l'évolution politique d'au moins cinq grands pays moyen-orientaux outre l'Afghanistan : l'égypte, l'Irak, l'Arabie Saoudite, l'Iran et le Pakistan. La catastrophe du 11 septembre est due d'abord, ab ovo, à un duel lointain, afghano-pakistanais. Comme les déchirements balkaniques ou le conflit israélo-palestinien, la persistance de la plaie afghane a fini, elle aussi, par empoisonner les relations internationales. La nouvelle guerre d'Afghanistan est déjà presque finie dans la mesure où le sort du régime des Tâlebân, du moins sous sa forme actuelle, apparaît scellé. Mais la diplomatie de demain doit veiller à ce que la crise de Kaboul ne resurgisse pas, pour éviter qu'elle n'explose à nouveau à la face de l'univers.
Aux origines du duel afghano-pakistanais : la faille locale de la « ligne Durand » (1947-1955)
S'il est une leçon que les puissances assimilent dans la douleur depuis le début du …
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