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COMMENT PEUT-ON ETRE SAOUDIEN ?

L' «après-11 septembre» s'est imposé à l'Arabie Saoudite comme un moment de l'histoire du royaume que ses dirigeants n'avaient pas prévu, et encore moins souhaité. Certes, il a été dit et écrit que le monde ne serait plus jamais le même après les attentats de New York et de Washington. Mais, si l'on excepte les Etats-Unis, l'Afghanistan et le Pakistan, nul pays plus que l'Arabie Saoudite n'a été autant affecté par les conséquences de cet événement. En quelques jours, la monarchie wahhabite, qui cultive le secret avec soin, a été placée malgré elle au centre de l'attention internationale d'une façon fort peu flatteuse. Accusée d'être, pêle-mêle, le berceau des terroristes, l'inspirateur idéologique et le soutien financier des réseaux islamistes à travers la planète, la patrie d'origine de Ben Laden et le «parrain» de ses protecteurs talibans, l'Arabie Saoudite connaît aussi à l'intérieur de ses frontières une contestation radicale.
Dans le passé, chaque fois qu'ils l'ont pu, les dirigeants saoudiens ont choisi de faire face aux problèmes auxquels ils étaient confrontés en différant leur traitement, dans l'espoir que le temps et l'argent parviendraient à réduire les tensions. A trois reprises cependant, au cours de la période récente, ils ont dû réagir : en 1979, pour réprimer l'insurrection de la Grande Mosquée de La Mecque ; en 1990, lorsque le roi Fahd a répondu à l'invasion du Koweït par l'Irak en faisant appel aux forces étrangères, c'est-à-dire pour l'essentiel américaines ; et au lendemain de l'attaque d'Al-Qaida contre les symboles de la puissance américaine sur le sol même des Etats-Unis.
La crise née des attentats a donc contraint le pouvoir saoudien à opérer des choix déchirants qu'il aurait préféré retarder aussi longtemps que possible : la rupture avec les Talibans, la redéfinition de la relation politique et militaire avec les Etats-Unis, la mise au pas de l'institution religieuse, à la fois pilier du régime et épicentre de sa contestation - tout cela sous l'oeil vigilant et critique, pour ne pas dire hostile, d'une grande partie de la presse internationale. En ce sens, il n'est pas exagéré d'affirmer que le 11 septembre 2001 a représenté un véritable traumatisme, tant pour la société saoudienne que pour ses dirigeants.
Riyad-Washington : des relations mal en point

La mise en cause du royaume par les médias américains et certains congressmen parmi les plus influents est intervenue alors que les relations entre Riyad et Washington étaient déjà fort mal en point. La dégradation de ces rapports, depuis l'accession à la Maison Blanche de George W. Bush, est inversement proportionnelle aux espoirs qu'avaient placés en lui la plupart des dirigeants arabes, au premier rang desquels les Saoudiens.
Bill Clinton, démocrate - et dont l'équipe en charge du Moyen-Orient comprenait de nombreux Juifs - , n'avait jamais été apprécié par la famille Al-Saoud. On lui en voulait d'avoir utilisé sans vergogne la puissance américaine pour pressurer commercialement le royaume à une période (1993-1998) où ses ressources financières étaient au plus bas. Plus proches idéologiquement des Républicains, les Saoudiens conservaient …