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MILITARO-HUMANITAIRE: LA CONFUSION DES GENRES

Transfert de Milosevic au Tribunal pénal international de La Haye ; arrestation du général Pinochet à Londres ; création prochaine d'une Cour pénale internationale chargée de sanctionner les auteurs des crimes internationaux les plus graves ; « guerre humanitaire » menée par l'Otan au Kosovo ; intervention de l'Australie au Timor-Est pour faire cesser les violations des droits de l'homme commises par les milices et l'armée indonésiennes : assisterait-on à une moralisation des relations internationales ?
Depuis le début des années 90, l'essor de la justice pénale internationale et, surtout, la multiplication d'interventions militaires déclenchées sur la base de justifications humanitaires pourraient laisser penser que la protection de groupes humains menacés par des violations massives des droits de l'homme serait devenue une préoccupation majeure de la « communauté internationale ».
Ce constat mérite toutefois d'être sérieusement nuancé. Alors même que les interventions militaires en appellent toujours à la morale et au droit, les préoccupations humanitaires, loin d'être au coeur de ces opérations, restent très largement invoquées sur un mode instrumental. Et cela, bien que le secrétaire général de l'ONU et les organisations non gouvernementales (ONG) tentent de faire émerger une doctrine d'intervention plus claire sur la question du recours à la force armée pour protéger les populations.
Le bel avenir des opérations de gestion de crise

La fin de la guerre froide a provoqué un mouvement de balancier de la défense collective vers la sécurité collective. La disparition de la menace soviétique a permis la transition d'une stratégie de confrontation à une stratégie de gestion de crise. Face à cette transformation de l'environnement international, « l'intervention militaire extérieure est revenue au centre de la réflexion stratégique et politique ». Plusieurs décisions, adoptées tant au niveau international que national, confirment cette tendance.
Créée en 1949 par le Traité de Washington, l'Otan était, jusqu'à récemment, une alliance militaire chargée exclusivement de défendre le territoire de ses membres contre une éventuelle invasion soviétique. Lors du sommet de Washington (23 et 24 avril 1999), les chefs d'Etat et de gouvernement des dix-neuf pays membres de l'Alliance atlantique ont adopté un nouveau concept stratégique. Tout en préservant sa fonction principale de défense territoriale, ils ont élargi sa mission et sa compétence géographique à la gestion de crise dans la zone euro-atlantique. Cette décision marque, selon le secrétaire général de l'Otan de l'époque, Javier Solana, « une transition entre une Alliance principalement préoccupée de défense collective et une organisation devenue garante de la sécurité en Europe et des valeurs démocratiques ». L'Otan est ainsi devenue, officiellement, un instrument permanent de gestion des crises, trouvant là une justification nouvelle à son existence.
L'Union européenne cherche, elle aussi, à devenir un acteur important de la gestion des crises, comme l'a rappelé Hubert Védrine, en septembre 2000, devant l'Assemblée générale des Nations unies. Lors du Conseil européen d'Helsinki, en décembre 1999, les Quinze ont décidé de créer, d'ici à 2003, une force de réaction rapide. Elle devra être capable de déployer, dans un délai de soixante jours, des forces …