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PAKISTAN : LES HOQUETS DE L'HISTOIRE

L'histoire semble se répéter au Pakistan : pour la seconde fois en deux décennies, un général parvenu au pouvoir à la suite d'un coup d'Etat réussit, deux ans plus tard, grâce à l'Afghanistan, à passer du statut de « dictateur peu recommandable » à celui d'allié privilégié des Etats-Unis. L'humiliation ressentie lors de la visite du président Clinton en mars 2000 est effacée : le Pakistan, Etat paria mis au ban du Commonwealth et soumis à des sanctions économiques et militaires, a brisé son isolement ; il est à nouveau courtisé par l'Occident. Le général Musharraf semble avoir fait d'une pierre deux coups : d'une part, il a acquis une légitimité certaine et, d'autre part, il peut espérer obtenir, en échange de son soutien aux Etats-Unis, une aide importante qui devrait contribuer à remettre l'économie de son pays sur pied. Quelques commentateurs, feignant d'ignorer que le Pakistan n'était pas en mesure de poser ses conditions, ont reproché au général Musharraf d'avoir cédé trop vite à toutes les exigences américaines, sans ouvrir le moindre débat public et sans consulter ni les autres pays musulmans ni la Chine. Mais la plupart des intellectuels libéraux, qui avaient justifié le putsch du général Musharraf en octobre 1999 au nom du sauvetage du pays, ont repris la plume pour expliquer à longueur d'éditoriaux que le Pakistan n'avait d'autre choix que de se ranger aux côtés des Etats-Unis. Les attentats du 11 septembre ont déclenché un vent de panique au Pakistan. Nombreux furent ceux qui éprouvèrent les pires craintes pour la survie du pays et qui pensèrent que l'Inde, si prompte à offrir ses services aux Etats-Unis, allait profiter de la situation pour attaquer - avec l'aval de Washington - les installations nucléaires et les camps de moudjahidin en Azad Cachemire. C'est, d'ailleurs, l'argument que le général Musharraf a utilisé pour justifier aux yeux d'une opinion majoritairement anti-américaine son « soutien sans réserve » aux Etats-Unis. Ce soutien impliquait l'utilisation de l'espace aérien national et le recours aux bases militaires pakistanaises pour un appui logistique, ainsi qu'une collaboration dans le domaine du renseignement. Perwez Musharraf a invoqué « l'intérêt national » en insistant sur la « très grave » menace qui aurait pesé sur le Pakistan s'il avait refusé de coopérer avec les Etats-Unis : « Imaginez un scénario dans lequel la coalition internationale, dont l'Inde aurait fait partie, nous aurait été hostile ... Au moins, maintenant, nos atouts stratégiques ne sont plus en péril ». Le général Musharraf s'est également félicité des avancées obtenues sur les quatre fronts suivants : intégrité et cohésion du Pakistan ; sécurité de l'armement nucléaire ; relance de l'économie ; protection des intérêts pakistanais au Cachemire. Le virage à 180° négocié par le Pakistan a certes permis au général Musharraf d'acquérir instantanément un statut politique et diplomatique de premier plan. Mais à quel prix et pour combien de temps ? Tout cela a un air de « déjà vu » pour l'opinion. Parce qu'ils continuent à subir les conséquences de …