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QUEL AVENIR POUR LA JUSTICE PENALE INTERNATIONALE?

Jusqu'à la fin des années 80, les violations des droits de l'homme n'étaient pratiquement jamais sanctionnées, a fortiori lorsqu'elles étaient commises par un Etat ou par ses dirigeants contre leurs propres ressortissants. La multiplication récente d'instances judiciaires sur ce sujet dans un nombre grandissant de pays et l'avènement d'une justice pénale internationale sont autant de signes de l'ascension du pouvoir juridictionnel. Mais les droits de l'homme restent largement théoriques en l'absence d'un gendarme chargé de veiller à leur application. Comment expliquer que ce gendarme ait vu le jour au cours de la dernière décennie du XXe siècle et quels développements son action est-elle susceptible de connaître en ce début du XXIe ?
Les juges sur le devant de la scène
L'impunité qui, mis à part l'épisode du procès de Nuremberg, fut longtemps la règle en matière de violation des droits de l'homme est en train de reculer dans plusieurs régions du monde sous la pression d'un activisme juridictionnel sans précédent. Tentons de mesurer l'ampleur du phénomène.
De l'arrestation du général Pinochet ...

L'arrestation à Londres du général Pinochet, en 1998, marque un tournant essentiel : désormais, il est possible de poursuivre pénalement, en dehors de leur territoire, d'anciens chefs d'Etat qui se sont rendus coupables de graves violations des droits de l'homme. Les décisions rendues à cette occasion par la Chambre des Lords valident cette possibilité en se référant à la Convention des Nations unies sur la torture de 1984.
En octobre 2000, deux événements marquent un nouveau resserrement de l'étau judiciaire sur les chefs d'Etat. Onze ans après l'attentat commis par les services spéciaux libyens contre un DC 10 d'UTA, la chambre d'accusation de la Cour d'Appel de Paris - ultérieurement contredite, il est vrai, par la Cour de Cassation - a estimé le 20 octobre 2000 que l'immunité reconnue aux chefs d'Etat en exercice ne pouvait pas s'appliquer à des actes de terrorisme. En conséquence, elle a lancé un mandat d'arrêt international contre le colonel Kadhafi.
Au même moment, le 19 octobre 2000, le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) condamne à la prison à perpétuité l'ancien premier ministre du Rwanda, Jean Kabanda, qui avait pourtant plaidé coupable. Aucune circonstance atténuante n'est retenue au bénéfice de l'ex-chef du gouvernement rwandais condamné pour violation de la Convention des Nations unies pour la prévention et la répression du génocide (9 décembre 1948). Ce jugement, selon le porte-parole du TPIR, «est un message pour les peuples du monde et une démonstration contre la culture de l'impunité».
La mise en accusation pendant le conflit du Kosovo, puis le transfèrement par le premier ministre serbe Zoran Djindjic, le 28 juin 2001 - alors même que la Cour constitutionnelle venait de refuser toute coopération avec le TPIY en l'absence de modification de la Constitution - de Slobodan Milosevic au Tribunal pénal international pour la Yougoslavie (TPIY) renforcent la crédibilité de la toute jeune justice pénale internationale. Accusé de crimes contre l'humanité au Kosovo, l'intéressé devra également répondre du crime de génocide en Bosnie-Herzégovine, …