Les Grands de ce monde s'expriment dans

BERLUSCONI, AN I

Une année de gouvernement
La sérénité est rarement de mise lorsque l'on évoque l'Italie et l'homme qui préside à ses destinées depuis plus d'un an. Entré en politique en 1993, Silvio Berlusconi a, à maintes reprises, suscité la polémique: en 1994, lorsque, après sa victoire aux élections, il fut appelé à former un premier gouvernement qui ne dura que quelques mois; durant la campagne électorale du printemps 2001, avant qu'il n'accède pour la seconde fois à la présidence du Conseil; à l'automne dernier, enfin, lorsqu'il affirma, après les attentats du 11 septembre, la supériorité de la civilisation occidentale sur l'islam.
Mais, progressivement, une situation contrastée s'est installée. En Italie, Silvio Berlusconi continue de nourrir les controverses et d'attiser les contestations venues de l'opposition, des syndicats et de multiples mouvements de citoyens. Il demeure également la cible des critiques des médias, des intellectuels et du monde de la culture, y compris à l'étranger comme l'ont montré les incidents au Salon du Livre de Paris en mars dernier. En revanche, l'Union européenne semble, elle, s'être accommodée de la présence de ce dirigeant hors normes qui, outre la direction de l'exécutif, assume, depuis janvier 2002, en remplacement de Renato Ruggiero, la charge de ministre des Affaires étrangères. Les quelques voix qui s'étaient élevées pour réclamer des sanctions à l'encontre de l'Italie, à l'instar de celles qui avaient frappé l'Autriche en 2000, n'ont pas tardé à se taire et, en dépit de quelques anicroches, une certaine harmonie règne désormais entre Rome et Bruxelles.
Silvio Berlusconi a, au moins, un motif de satisfaction que doivent lui envier nombre de ses opposants: dans une démocratie italienne caractérisée par l'instabilité, l'actuel président du Conseil peut raisonnablement espérer disposer du temps nécessaire pour mener à bien son action. Déjà, cette seconde expérience gouvernementale a dépassé la première de quelques mois. Mieux encore: sauf erreurs monumentales ou accidents imprévisibles, Silvio Berlusconi est assuré de rester au palais Chigi — siège de la présidence du Conseil à Rome — pour une législature entière. Il bénéficie, il est vrai, de trois atouts importants.
Les atouts de Berlusconi
D'abord, il est le chef incontesté de la Maison des libertés. Cette coalition disparate regroupe son propre parti, Forza Italia, l'Alliance nationale (issue du fascisme), la Ligue Nord (mouvement régionaliste) et les démocrates chrétiens de centre droit, réunis dans les CCD-CDU (Centre chrétien démocrate-Chrétiens démocrates unis). Avec une grande habileté politique, Berlusconi a su ressouder l'entente rompue par la Ligue Nord à la fin de l'année 1994. Sans lui, il n'y aurait pas eu de Maison des libertés et encore moins de victoire électorale. Aujourd'hui, il est la figure emblématique de la coalition et son autorité de chef de gouvernement n'est pas remise en cause. Sans doute certains dans la majorité expriment-ils parfois des doutes, suggèrent-ils des critiques et, même, tirent-ils des plans sur la comète à propos de l'après-Berlusconi. Mais, pour l'instant, en dépit de profonds désaccords, personne ne songe à contester ouvertement sa prééminence, et celui qui s'y risquerait le paierait très …