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À QUI PROFITERA L'ÉLARGISSEMENT ?

Le sommet européen de Copenhague du 13 décembre 2002 l'a confirmé : le 1er mai 2004, onze ans après le premier sommet de Copenhague en 1993, qui avait donné le coup d'envoi de l'élargissement, dix nouveaux pays s'adjoindront aux quinze membres actuels de l'Union européenne. Ces nouveaux venus sont : les quatre pays d'Europe centrale dits du " groupe de Visegrad " (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie), les trois pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie), la Slovénie, ainsi que deux îles de la Méditerranée, Chypre et Malte. Rendez-vous a également été pris en 2007 pour l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie, et fin 2004 pour décider de la date de l'éventuel début des négociations d'adhésion avec la Turquie.
Cet élargissement massif, sans précédent, entrera en vigueur après la signature du traité d'adhésion à Athènes le 16 avril 2003. Mais ce n'est pas tout : il faudra ensuite que le Traité soit ratifié par chacun des quinze membres de l'Union, en principe par voie parlementaire, et par tous les pays candidats, en principe par référendum. Bien que, à l'Est, les sondages laissent présager la victoire du " oui " et que, à l'Ouest, les Parlements y soient favorables, le suspense durera jusqu'à la fin. Car si la défection éventuelle d'un pays candidat reste sans conséquences sur l'élargissement, en revanche, le refus d'un seul membre de l'Union bloquerait tout le processus.
Aucun gouvernement, néanmoins, n'échappera à un débat public - un débat qui s'annonce d'autant plus animé que les opinions sont inquiètes. Ce sont, en effet, des pays pauvres qui s'apprêtent à entrer dans l'Union. Avec un PIB qui représente à peine 5 % du PIB des Quinze, ils feront baisser le revenu européen par habitant de 15 %. La Pologne est deux fois moins riche que ne l'était l'Espagne au moment de son adhésion. Les projections économiques montrent qu'à l'exception de la Slovénie et de la République tchèque qui rattraperont leur retard plus rapidement (respectivement 13 ans et 19 ans), l'alignement de ces pays sur le niveau européen prendra en moyenne plus de 30 ans (32 ans pour la Pologne, 38 ans pour la Lettonie, 23 ans pour la Hongrie). À condition qu'ils connaissent un taux de croissance très dynamique, ce qui n'a pas été le cas au cours des deux dernières années.
Or le prix de la convergence est élevé. Celle des pays les moins avancés de l'Union actuelle - Espagne, Grèce, Portugal, Irlande - a déjà coûté quelque 165 milliards d'euros depuis 1990 et le processus n'est pas achevé. Même si les experts se veulent rassurants et affirment que les erreurs commises lors de la réunification de l'Allemagne ne seront pas répétées, le coût colossal de cette opération (1) suscite des craintes légitimes. Le nouvel élargissement doit-il se transformer, pour les Quinze, en tonneau des Danaïdes ? Sont-ils, par surcroît, menacés par une vague de délocalisations d'entreprises et des flux migratoires incontrôlés ? Autant de fantasmes qui cachent une réalité beaucoup plus nuancée.
Des avantages tangibles pour les …