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ARABIE SAOUDITE : L'ENNEMI PUBLIC No 1

Amir Taheri - Vous avez placé l'Arabie saoudite au " cœur " de la menace terroriste. Vous avez même suggéré qu'elle devait désormais être considérée comme une ennemie. N'avez-vous pas le sentiment d'être allé un peu trop loin ?
Laurent Murawiec - Pas du tout. J'ai fait ce que fait le petit garçon de la fable quand il dit tout fort que le roi est nu. Tout le monde sait à quoi s'en tenir sur la place centrale de l'Arabie saoudite dans le réseau terroriste mondial, mais la plupart des gens préfèrent l'ignorer. Qui étaient les pirates de l'air suicidaires du 11 Septembre ? Sur dix-neuf, quinze étaient saoudiens. Qui était leur cerveau ? Un millionnaire saoudien. Comment ont-ils obtenu l'argent nécessaire ? Par l'Arabie saoudite. Ajoutez à cela le rôle que l'Arabie saoudite a joué dans la promotion du fondamentalisme radical à travers le monde et vous obtenez un panorama complet. Chaque jour qui passe apporte de nouvelles preuves de l'implication saoudienne à tous les niveaux.
A. T. - Peut-on prouver que l'État saoudien a directement apporté son soutien à Oussama Ben Laden ?
L. M. - Toutes les preuves sont là. Pour commencer, il est certain que Ben Laden a travaillé pour les services secrets du royaume. Quant à sa famille, elle a bâti sa fortune sur les contrats du gouvernement saoudien. Souvenez-vous : en 1998, le gouvernement soudanais, alors contrôlé par le fondamentaliste Hassan al-Tourabi, a proposé aux États-Unis de leur livrer Ben Laden. Les Saoudiens ont immédiatement dépêché à Khartoum deux émissaires chargés d'organiser sa fuite en Afghanistan. Ils lui firent cadeau de 200 millions de dollars (1) pour couvrir ses frais de voyage et l'aidèrent à s'installer. En échange, Oussama était prié de se concentrer sur d'autres cibles que le royaume. Nous savons que, au cours des dix dernières années, l'argent d'Oussama a servi à financer des opérations terroristes dans une trentaine de pays. Mais jamais en Arabie saoudite ! Oussama a respecté le pacte de non-agression qui le liait à la famille royale. Même maintenant, s'il est encore en vie, il doit se cacher quelque part sous la protection des services secrets pakistanais. Or il est de notoriété publique que les chefs de l'ISI et la plupart de leurs agents sont à la solde des Saoudiens depuis des années. Si les Saoudiens veulent enfumer la grotte de Ben Laden pour le faire sortir, ils le peuvent.
A. T. - Les relations Arabie saoudite-États-Unis datent d'au moins soixante-dix ans. Les deux pays ont fait preuve d'une convergence de vues totale sur de nombreux sujets, particulièrement pendant la guerre froide. Pourquoi les Saoudiens voudraient-ils s'attaquer à leur plus loyal allié et partenaire ?
L. M. - On peut distinguer trois phases dans les relations Washington-Riyad. La première a commencé lorsque le président Franklin Roosevelt et le roi Abdelaziz Ibn Saoud se rencontrèrent en 1945 et conclurent une alliance stratégique. Les États-Unis avaient alors besoin du pétrole saoudien et les Saoudiens avaient besoin de la protection et …