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DROGUE ET TERRORISME : LES LIENS DU SANG

Le soutien apporté par les Talibans à l'organisation Al-Qaida, associé au fait que l'Afghanistan a été pendant toutes les années 1990 le premier producteur mondial d'opium, a contribué, après le 11 septembre 2001, à la médiatisation des liens entre drogue et terrorisme. Or, paradoxalement, cette ressource illicite n'a joué qu'un rôle mineur dans le financement des réseaux d'Oussama Ben Laden. En revanche, des groupes terroristes, des rébellions et les services secrets de différents États - ces deux derniers acteurs utilisant également des méthodes terroristes - tirent parti de l'argent de la drogue pour développer leurs activités (1). Il est donc important de distinguer les mouvements purement terroristes de ceux qui recourent, à titre occasionnel ou systématique, à la terreur : campagnes de libération, soulèvements nationalistes et ethniques, guérillas rurales ou urbaines.
Les mouvements purement terroristes naquirent à la fin du XIXe siècle : nihilistes russes, anarchistes français et, plus tard, " Main noire " serbe. La nature, les desseins et les pratiques de ces précurseurs étaient déjà ceux de leurs continuateurs contemporains : les Brigades rouges italiennes, la Fraction armée rouge allemande, l'Armée rouge japonaise, les Loups gris de Turquie, les groupes Abou Nidal, Action directe ou Al-Qaida. Peu influents, sans vraie base sociale, leurs cibles sont symboliques : l'archiduc François-Ferdinand, les athlètes israéliens, le politicien Aldo Moro, le chef du patronat Hans Martin Schleyer ou les tours du World Trade Center. Comme l'explique l'historien Dominique Venner, " c'est un défi du faible au fort qui veut pousser le fort à un usage excessif de sa force afin de soulever contre lui l'indignation et la révolte " (2). Le chercheur Peter Waldmann ajoute de manière pertinente : " Les guérillas se proposent de conquérir des territoires et des richesses, alors que les terroristes s'attachent à occuper l'espace mental du public " (3). Ce qui est sûr, en tout cas, c'est que l'impact des médias de masse sert toujours les objectifs des terroristes en donnant une diffusion planétaire à leurs actions.
On peut, certes, objecter à ces analyses qu'Al-Qaida disposait en Afghanistan d'une armée de plusieurs milliers de combattants et jouissait d'un incontestable soutien populaire dans certains pays arabes. Mais il faut relativiser sa puissance en la rapportant à ses buts : les États-Unis et, au-delà, le monde. Cette organisation est faible à l'échelle internationale, mais elle tente de créer un sentiment de panique parmi les populations des pays riches par le biais d'actions emblématiques. L'attentat commis à Bali le 12 octobre 2002 contre des touristes étrangers a confirmé cette stratégie.
Le terrorisme urbain
Les mouvements terroristes se distinguent clairement des guérillas rurales qui se sont développées à partir de la seconde moitié des années 1950, en Amérique latine, en Asie et au Moyen-Orient. Ces dernières formulent des revendications tantôt ethniques, comme les combattants karens, kachins et shans en Birmanie (4) ; tantôt politiques, à l'image des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et de la Nouvelle armée du peuple des Philippines (NPA). Parfois, les considérations ethniques et politiques se mêlent, …