Xavier Harel - Les réserves de pétrole de l'Irak (112 milliards de barils) sont les plus importantes du monde après celles de l'Arabie saoudite. Durant sa campagne, George W. Bush a bénéficié du soutien des compagnies pétrolières. De nombreux membres de son entourage - de son vice-président Dick Cheney à son conseiller pour la sécurité Condoleezza Rice - ont longtemps travaillé dans ce secteur. Vous semble-t-il justifié de dire que le pétrole a joué un rôle prépondérant dans la décision du président américain de renverser le régime de Saddam Hussein ?
James Wolfensohn - Je ne connais évidemment pas les pensées intimes de George W. Bush. Mais j'ai eu de nombreuses discussions avec des représentants haut placés de son administration et je peux affirmer, en toute franchise, que je n'ai décelé chez eux aucune indication qui permette d'affirmer que le pétrole est l'une des clés de cette guerre. J'ai pu le vérifier à de nombreuses reprises. Les justifications de cette intervention s'expriment très simplement : George W. Bush a toujours pensé en toute sincérité que Dieu était à ses côtés pour débarrasser le monde d'un dictateur, régler le problème des armes de destruction massive et instaurer un régime démocratique en Irak. On peut longuement discuter du caractère réalisable de ces objectifs. Mais à la question " le pétrole a-t-il quelque chose à voir avec cette opération ? ", ma réponse est non !
X. H. - Quelles seront les répercussions de cette guerre sur les économies de la région ?
J. W. - Ce conflit est, bien entendu, très déstabilisant pour le Moyen-Orient. Prenons le cas de la Jordanie, un pays que je connais bien : le contrecoup du déclenchement des hostilités sur son économie a été immédiat. L'approvisionnement en pétrole de ce pays dépend entièrement de l'Irak, qui lui livre son brut à des prix subventionnés. Si la Jordanie achetait son pétrole sur le marché international, elle dépenserait 500 millions de dollars supplémentaires chaque année ! Par surcroît, le royaume hachémite exporte vers l'Irak l'équivalent de 400 millions de dollars de marchandises par an. Enfin, le tourisme lui rapporte chaque année environ 150 millions de dollars. Lorsque l'on additionne ces sommes, on se rend compte que la guerre en Irak pourrait faire perdre à la Jordanie plus d'un milliard de dollars sur un an. Un manque à gagner considérable pour une économie dont le PIB n'atteint même pas 9 milliards de dollars ! La Syrie se trouve - à un moindre degré - dans une situation similaire. Mais il est vrai que son PIB est largement supérieur à celui de la Jordanie et que Damas ne vend pratiquement plus rien à l'Irak. Quant à l'Égypte, la baisse de la fréquentation touristique et la réduction du trafic sur le canal de Suez devraient lui coûter environ 3 milliards de dollars. Le choc sera moindre, toutefois, dans la mesure où le PIB égyptien s'élève à 95 milliards de dollars.
X. H. - Qu'en est-il de la Turquie, qui partage également une …
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