George W. Bush résistera-t-il aux assauts de John Kerry ? La politique étrangère jouera-t-elle un rôle décisif dans les derniers mois de la campagne ? Et si tel est le cas, est-ce à dire qu'elle fera nécessairement pencher la balance du côté du challenger ?
Certes, la situation en Irak n'est pas franchement conviviale ; mais comment être sûr que les Américains, dans leur for intérieur, reprochent vraiment à l'hôte de la Maison-Blanche sa lutte obstinée contre les " forces du Mal " ? Après tout, l'Amérique a toujours défendu quelque chose de plus que son propre confort. Quand George W. Bush ferraille contre les dictateurs ; débusque et dénonce les " proliférateurs " en matière nucléaire ; traque les terroristes de toutes obédiences ; en un mot, refuse d'accepter aveuglément le statu quo international et tente - parfois maladroitement, il est vrai - de " changer le monde ", rien ne dit que ses compatriotes récusent a priori des choix aussi ambitieux.
Naturellement, l'économie et la sécurité intérieure (l'attentat contre les Twin Towers est dans toutes les têtes) pèseront aussi sur les motivations électorales. En tout cas, si aucune mauvaise surprise ne survient en ces deux domaines et si la violence, sur le sol irakien, finit par baisser d'un cran, la partie devrait rester relativement ouverte jusqu'à la Présidentielle de novembre.
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Une élection aussi décisive ne se déroule pas, c'est l'évidence, en état d'apesanteur. C'est pourquoi notre Rédaction a souhaité, également, planter le décor et braquer le projecteur sur les zones de la scène qui occupent la " Une " des médias.
- Irak : un départ précipité des GI's est-il vraiment - comme l'affirment certains - le prix à payer pour que se taisent les armes ?
- Arabie saoudite : est-il prouvé que la dynastie des Saoud, au pouvoir à Riyad, finance le terrorisme international ?
- Libye : après vingt-cinq ans d'isolement diplomatique, Kadhafi est-il sur le point de devenir un gentleman respectable ?
- Iran : l'opposition conservateurs/réformateurs ne constitue-t-elle pas une immense illusion destinée à duper l'Occident ?
- Israël : la politique sécuritaire d'Ariel Sharon est-elle bien la seule qui puisse mettre un terme aux attentats terroristes palestiniens ?
- Pakistan : quel rôle exact Islamabad a-t-il joué dans le développement du " marché noir " mondial du nucléaire ?
- Russie : subrepticement, calmement, implacablement, Vladimir Poutine n'est-il pas en train de reconstituer l'Empire
russe en " reconquérant " la plupart des anciennes républiques soviétiques ?
À toutes ces interrogations qui taraudent les Chancelleries (et que pas plus George W. Bush que John Kerry ne sauraient exclure de leur champ de vision) répondent dans ces pages, comme à l'accoutumée, ceux qui décryptent l'actualité et ceux qui la font, experts et acteurs.
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C'est, toujours, à cette double compétence que nous avons eu recours pour analyser 1°) les conséquences du nouvel élargissement de l'Union européenne (1er mai 2004) et 2°) l'impact du changement de majorité en Espagne sur le destin de la Constitution européenne...
Là encore, nos lecteurs apprécieront, je pense, les commentaires contrastés des personnalités éminentes que nous avons sollicitées.
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Reste le souvenir et la mémoire. Quand Pascal écrit que " le temps guérit les douleurs et les querelles ", a-t-il raison ? Nous avons, ce trimestre, tenté d'évaluer la pertinence de ce précepte dans deux pays africains à valeur emblématique :
- L'Afrique du Sud : 10 ans après les premières élections multiraciales, le peuple sud-africain, Noirs et Blancs confondus, est-il enfin réconcilié avec lui-même ?
- Le Rwanda : 10 ans après avoir subi l'un des plus atroces génocides de l'Histoire moderne (entre 500 000 et 1 million de victimes), les Rwandais sont-ils parvenus à cicatriser leurs plaies ?
Question subsidiaire : quel jeu Paul Kagamé, le président du Rwanda, joue-t-il au juste en dénonçant aussi violemment les " responsabilités de la France " dans la tragédie vécue par son pays il y a une décennie ? Qui est coupable ? Qui dit vrai ?
" La vérité - se plaisait à répéter Oscar Wilde - est rarement pure et jamais simple... "
Voilà. Tout est dit.
À toutes et à tous : bonne lecture.