Ce Numéro d'automne s'ouvre sur un stimulant dossier consacré à la crise Washington/Bagdad et à ses retombées — économiques, diplomatiques, politiques et morales.
Le destin de Saddam Hussein est-il définitivement scellé ? À quelles vraies raisons la « croisade » de George Bush obéit-elle ? Quelle est la réalité de la menace irakienne ? Quel serait l'impact d'une nouvelle guerre du Golfe sur l'économie mon-
diale ?
Autre interrogation essentielle : pourquoi certaines élites européennes sont-elles à ce point anti-américaines ? Haine feutrée du modèle libéral ? Volonté de s'exonérer de ses propres fautes en les imputant aux États-Unis ? Jalousie inconsciente vis-à-vis d'une puissance dont, pour la première fois dans l'histoire moderne, les dépenses militaires seront supérieures à celles — cumulées ! — des vingt puissances suivantes ?
Quelle que soit la cause de cette étrange américanophobie, il est évident qu'elle ne peut déboucher que sur de nouveaux malentendus transatlantiques. Des malentendus dont on se passerait volontiers à l'heure d'Al-Qaïda et de son terrorisme sans visage…
Sur tous ces points sensibles nous publions, comme à l'accoutumée, les analyses de ceux qui décryptent l'événement et les témoignages de ceux qui le font.
Nos lecteurs apprécieront, je pense, la qualité et la variété de ces contributions.
Mais l'actualité sur laquelle notre Rédaction a choisi de braquer le projecteur, ce trimestre, c'est aussi :
L'Afghanistan : Washington est-il en train d'y perdre la paix après y avoir gagné la guerre ?
La Libye : les efforts que déploie le colonel Kadhafi pour réintégrer le cercle des nations « respectables » finiront-ils par être couronnés de succès ?
La Guinée équatoriale : s'est-on aperçu que ce petit État pétrolier, tenu d'une poigne d'acier par un dictateur peu scrupuleux en matière de droits de l'homme, est en train de devenir l'objet de toutes les convoitises, une sorte de « Koweït de l'Afrique » ?
La Colombie : le nouveau président, Alvaro Uribe, parviendra-t-il, à la fois, à faire entendre raison à la guérilla, à neutraliser les paramilitaires et à maîtriser les narco-trafiquants ?
Le Cachemire : ce « laboratoire » de l'antagonisme indo-pakistanais est-il voué au terrorisme perpétuel ? Au-delà même de cet enjeu, une réconciliation entre les deux « ennemis intimes » est-elle concevable ?
La Chine : avec l'ouverture du XVIe congrès du Parti communiste chinois, une nouvelle génération va s'emparer des rênes du pouvoir. Aucun des futurs promus, parmi les plus hauts responsables, n'a étudié dans un pays de l'ex-bloc soviétique ; et aucun, pour cause de jeunesse, n'a participé à la Révolution de 1949.
Quels effets ce double changement aura-t-il sur la politique chinoise dans les années à venir ? Le mystère est là.
Naturellement, ce tour d'horizon serait incomplet sans une étape sur le sol de notre Vieux Continent. Étape marquée par une question décisive : à quoi ressemblera l'Union européenne une fois qu'elle aura accueilli en son sein dix pays supplémentaires ? Cette Europe élargie sera-t-elle gouvernable ?
Pour éclairer le chemin, nous avons, entre autres signatures prestigieuses, ouvert nos colonnes à un personnage exceptionnel, un personnage qui incarne à lui seul les trois grands combats du siècle : contre le nazisme, contre le communisme, pour l'Unité européenne.
Cet homme hors du commun, c'est Monseigneur Otto de Habsbourg. À 90 ans cet automne, avec sa conviction, son courage, son humour, son enthousiasme, sa tolérance, Monseigneur Otto de Habsbourg est l'homme le plus éternellement jeune et le plus constamment lucide que la Providence puisse nous faire rencontrer. Écoutez-le : son message a la tonalité des aubes rayonnantes. Il fait songer au bel aphorisme de Georges Bernanos : « On ne subit pas l'avenir, on le fait. »
À toutes et à tous : bonne lecture.